• La chaîne de roses 

     

    Je la surpris à l’ombre du printemps

    et l’enchaînai de guirlandes de roses.

    Elle dormait et n’en put rien sentir.

     

    Elle était là, devant moi. Ce regard

    vouait ma vie tout entière à sa vie.

    Je le sentis au cœur et n’en sus rien.

     

    Je souriais vers elle sans mot dire

    et laissai murmurer les guirlandes de roses

    Elle surgit alors du songe et s’éveilla.

     

    J’étais là, devant elle.

    Ce regard trouait sa vie tout entière à ma vie

    ce fut tout autour de nous le paradis.

     

    Friedrich Gottlieb Klopstock

     


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  • Le parfum

     

    Un sage était plongé dans une méditation profonde. Lorsqu’il sortit de son extase, un de ses compagnons lui dit :

    -Que nous rapportes-tu de ce beau jardin où tu te promenais ?

    Le sage répondit :

                     J’avais rempli de roses le pan de ma robe, et je voulais vous les distribuer, mais leur parfum m’a tellement enivré que le pan de ma robe s’est échappé de mes mains.

     

    Saadi

    Le parfum


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  • Voici l’heure...

     

    Une rose, dans une buire, embaume autant que sur le rosier. Notre amour est une rose cueillie, le parfum ne veut pas mourir.

    Pour ne plus sentir son odeur, je l’ai cachée dans les coffrets. Leurs parois n’étaient pas assez épaisses. Je l’ai enfouie dans le sable. Elle y avait pris racine et devenait un rosier démesuré.

    Je l’ai effeuillée avec rage : mes mains en sont à jamais parfumées !

     

    Poème Persans

     


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  • La mort n'est rien

     

    La mort n'est rien,

    je suis seulement passé, dans la pièce à côté.

     

    Je suis moi. Vous êtes vous.

    Ce que j'étais pour vous, je le suis toujours.

     

    Donnez-moi le nom que vous m'avez toujours donné,

    parlez-moi comme vous l'avez toujours fait.

    N'employez pas un ton différent,

    ne prenez pas un air solennel ou triste.

    Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble.

     

    Priez, souriez,

    pensez à moi,

    priez pour moi.

     

    Que mon nom soit prononcé à la maison

    comme il l'a toujours été,

    sans emphase d'aucune sorte,

    sans une trace d'ombre.

     

    La vie signifie tout ce qu'elle a toujours été.

    Le fil n'est pas coupé.

    Pourquoi serais-je hors de vos pensées,

    simplement parce que je suis hors de votre vue ?

    Je ne suis pas loin, juste de l'autre côté du chemin.

     

    Canon Henry Scott-Holland (1847-1918), traduction d'un extrait de "The King of Terrors", sermon sur la mort 1910

    Quelquefois attribué à Charles Péguy, d'après un texte de Saint Augustin

    Bretagne, Octobre 2016 Jardin aux Moines


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  • Novembre sur le quai (la ronde des mois)

    Quelque part le long du quai
    Les cheveux, par le vent, emmêlés
    Dans mon vieux pull, emmitouflée
    Sans résister, je me laisse embarquer,
    Sur les ailes invisibles du vent.
    Je m'abandonne à mon imaginaire
    Bien au-delà des hautes terres,
    Très loin du côté du levant.

    Novembre s'étire sur le flanc des collines
    Jetant une immense couverture
    De chauds coloris sur la nature
    Dans la lumière du jour qui décline.
    La valse des feuilles mortes
    Que le vent transporte
    Me ramène à la réalité.
    Sortant de mon immobilité
    Je relève mon col frileusement
    Et m'éloigne à grands pas, rapidement.

    Dominique SAGNE 


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  • Le jardin des caresses

     

    Le coquelicot puise sa pourpre dans le sang d’un Empereur enseveli. La violette naît du grain de beauté qui étoilait le visage d’un adolescente

     

    Ce narcisse qui tremble au bord du ruisseau, ses racines sortent peut-être des lèvres décomposées d’une femme. Que tes pas effleurent légèrement le gazon ! Dis-toi qu’il a germé dans les cendres de beaux visages qui avaient l’éclat des tulipes rouges...

     

    Notre univers est une tonnelle de roses. Nos visiteurs sont les papillons. Nos musiciens sont les rossignols. Quand il n’y a plus ni roses ni feuilles, les étoiles sont mes roses et ta chevelure est ma forêt.

     

    Umar Khayyâm

     

    Forêt de Paimpont


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  • Au parc de Bagatelle

     

    La forte chaleur de ces derniers jours forme des symphonies de fleurs — d’innombrables tulipes flamboyaient sur les pelouses et sur les îles du petit lac.

    En certaines fleurs qui pendaient aux murailles, comme ces grappes de glycines violettes ou d’un gris soyeux, légères comme plume et pourtant lourdes de beauté, Flore semble s’être surpassée — cela nous ouvre les jardins de légendes, les jardins enchantés.

    Un tel spectacle est toujours pour moi comme un appel, une promesse de magnificences éternelles — l’étincelant rayon jeté par des trésors devant lesquels une porte s’est passagèrement ouverte.

    L’éphémère, c’est ce qui se fane, et pourtant ces miracles floraux sont les symboles d’une vie qui ne se flétrit jamais.

    De là vient l’enchantement de leur couleur et de leur parfum ; ils éclaboussent le cœur en étincelles multicolores.

     

    Ernst Jünger

     

    Image https://pixabay.com/fr/pierre-bloom-fleur-couleur-color


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  • L’âne dormant

     

    C’est un âne qui dort

    Enfants, regardez-le dormir

    Ne le réveillez pas

    Ne lui faites pas de blagues

    Quand il ne dort pas,

    il est très souvent malheureux

     

    Il ne mange pas tous les jours.

    On oublie de lui donner à boire.

    Et puis on tape dessus.

    Regardez-le

    Il est plus beau que les statues

    qu’on vous dit d’admirer et qui vous ennuient.

     

    Il est vivant, il respire

    Confortablement installé

    Dans son rêve.

     

    Les grandes personnes disent que la poule

    Rêve de grain et l’âne d’avoine.

    Les grandes personnes disent ça

    pour dire quelque chose,

    elles feraient mieux de s’occuper

    de leurs rêves à elles,

    de leurs petits cauchemars personnels.

     

     

    Sur l’herbe à côté de sa tête,

    il y a deux plumes. S’il les a vues

    avant de s’endormir il rêve peut-être

    qu’il est oiseau et qu’il vole.

    Ou peut-être il rêve d’autre chose.

    Par exemple qu’il est à l’école des garçons,

    caché dans l’armoire aux cartons à dessin.

     

     

    Il y a un petit garçon

    qui ne sait pas faire son problème.

    Alors le maître lui dit :

    Vous êtes un âne, Nicolas !

    C’est désastreux

    pour Nicolas.

    Il va pleurer.

    Mais l’âne sort de sa cachette.

    Le maître ne le voit pas.

    Et l’âne fait le problème du petit garçon.

    Le petit garçon va porter le problème au maître,

    et le maître dit :

    C’est très bien, Nicolas !

     

    Alors l’âne et Nicolas

    Rient tout doucement aux éclats,

    Mais le maître ne les entends pas.

     

    Et si l’âne ne rêve pas ça

    C’est qu’il rêve autre chose.

    Tout ce qu’on peut savoir,

    C’est qu’il rêve.

    Tout le monde rêve.

     

    Jacques Prévert 


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  • Fleurs

     

    Sous la poussière d’or qui tombe des tilleuls

    L’air lucide flamboie ainsi qu’une verrière

    Transparente où la souple et féline lumière

    Rôde autour des rosiers, des lys et des glaïeuls.

     

    Fleurs! songes enflammés de la Terre! armoiries

    Dont l’azur qui triomphe a marqué les gazons.

    Vos luxes tour à tour insultent les prairies

    Et sont une fourrure aux pieds de nos maisons.

     

    Âmes du Feu ! esprits dangereux des Essences !

    Que ne puis-je, vaincu par vos fauves puissances.

    Dans la tranquille ardeur d’un grand midi vermeil.

     

    Au jardin reflétant la clarté qui l’arrose

    Et tissant mon linceul de soie et de soleil.

    Mourir sous la caresse éclatante des roses!

     

    Vincent Muselli

     


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  • Immense et rouge

     

    Immense et rouge

    Au-dessus du Grand Palais

    Le soleil d’hiver apparaît

    Et disparaît

    Comme lui mon cœur va disparaître

    Et tout mon sang va s’en aller

    S’en aller à ta recherche

    Mon amour

    Ma beauté

    Et te trouver

    Là où tu es.

     

    Jacques Prévert (extrait du livre « Au hasard des oiseaux)

     

     Octobre 2016


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  • Soyez polis

     

    La terre aime le soleil

    Et elle tourne

    Pour se faire admirer

    Et le soleil la trouve belle

    Et il brille sur elle

    Et quand il est fatigué

    Il va se coucher

    Et la lune se lève.

    Jacques Prévert (extrait du livre « Au hasard des oiseaux)

    Sur les bords du canal de l'Oise


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  • Automne (Colchiques dans les prés)

     

    Colchiques dans les prés
    Fleurissent, fleurissent
    Colchiques dans les prés
    C’est la fin de l’été


    La feuille d’automne emportée par le vent
    En ronde monotone tombe en tourbillonnant.


    Châtaignes dans les bois, se fendent, se fendent,
    Châtaignes dans les bois, se fendent sous nos pas


    La feuille d’automne emportée par le vent
    En ronde monotone tombe en tourbillonnant


    Nuages dans le ciel, s’étirent, s’étirent
    Nuages dans le ciel s’étirent comme une aile


    La feuille d’automne emportée par le vent
    En ronde monotone, tombe en tourbillonnant


    Et ce chant dans mon cœur, murmure, murmure
    Et ce chant dans mon cœur appelle le bonheur

     

    Jacqueline Debatte

     


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  • L’école des beaux arts

     

    Dans une boîte de paille tressée

    Le père choisit une petite boule de papier

    Et il la jette Dans la cuvette

    Devant ses enfants intrigués

    Surgit alors Multicolore

    La grande fleur japonaise

    Le nénuphar instantané

    Et les enfants se taisent émerveillés

    Jamais plus tard dans leur souvenir

    Cette fleur ne pourra se faner

    Cette fleur subite

    Faite pour eux

    A la minute

    Devant eux.

     

    Jacques Prévert (extrait du livre « Au hasard des oiseaux)

    L’école des beaux arts


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