• « Le théâtre de notre vie est fréquenté par des couples étranges, très unis malgré leurs différences : la joie et la souffrance, la crainte et l'espérance, le bien et le mal...

    Certaines circonstances nous permettent de mieux saisir le sens de leur paradoxal attachement mutuel : si les abîmes du mal n'existaient pas, l'homme déploierait-il la même vigueur pour conquérir les sommets du bien ? Si la crainte ne tempérait pas l'espérance, n'aurait-on pas la fâcheuse tendance à dégrader cette dernière en la transformant en suffisance ? Et comment pourrait-on apprécier la pleine saveur de la joie, si la tristesse ou la souffrance ne nous en faisaient pas sentir le désir, l'attente, la réalité précieuse, fragmentaire et tellement fragile ? Le sourire né des pleurs, la joie au-delà de la souffrance, c'est l'Himalaya de nos joies sur terre, la plus haute altitude accessible à nos sentiments, l'air le plus pur que nous puissions respirer. Parce qu'il s'agit d'une joie conquise, d'une joie de conversion, d'une trouée de lumière perçue dans les ténèbres profondes et qui annonce une nouvelle clarté dans notre vie. »

    « Et même si nous ne le percevons pas toujours, il y a toujours de la beauté derrière l’apparence des choses. Au soir de notre vie, dit Saint Jean de la Croix, nous serons jugés sur l’amour. Est-ce que l’amour sinon cet élan insistant à ne voir que de la beauté, dans les personnes, les évènements, le monde, la vie-même malgré son apparente dureté ? »

    « Nous avons tendance à considérer que la joie dépend des circonstances extérieures, alors qu'elle est d'abord une inclination du dedans. En doutez-vous ? Comment expliquez-vous alors que ceux dont on dit qu'ils ont "tout pour être heureux" le soient si peu ? Et que pour recueillir les sourires d'enfants les plus radieux, il faille se rendre dans les lieux les plus misérables de la planète, comme à Calcutta dans ce bidonville paradoxalement surnommé « la Cité de la Joie » ? D'où vient que la joie jaillit avec une telle pureté du cœur des miséreux, comme la rosé qui ne saurait mieux s'épanouir que dans le fumier ? La joie ? Tu peux aller la chercher au bout du monde, en des lieux réputés paradisiaques, mais si tu ne la possèdes pas déjà en toi, tu ne la trouveras pas. »


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  • La fourmi amoureuse

     

    Le roi Salomon, cheminant un jour par les sentiers du désert, rencontra une fourmilière. Toutes les fourmis aussitôt vinrent à lui pour saluer l'empreinte de ses pas. Une seule ne se soucia pas de sa présence. Elle resta devant son trou, occupée à un labeur apparemment infini. Salomon l'aperçut à l'écart de ses compagnes. Il se pencha sur son corps  minuscule et lui dit :

    — Que fais-tu donc, bête menue ? La fourmi lui répondit, sans se laisser autrement distraire de son travail

    — Vois, roi des rois, un grain après l'autre je déplace ce tas de sable.

    — Ô fourmi généreuse, lui dit Salomon, n'est-ce point là un labeur exagéré pour tes faibles forces ? Ce tas de sable te dépasse de si haut que tes yeux ne sauraient en voir la cime. Aurais-tu la longévité de Mathusalem et la patience de Job, tu ne pourrais espérer l'effacer de ta route.

    — Ô grand roi, lui répondit la fourmi, c'est pour l'amour de ma bien-aimée que je travaille ainsi. Cet obstacle me sépare d'elle. Rien ne pourra donc me distraire de son effacement. Et si à cette œuvre j'use toutes mes forces, au moins je mourrai dans l'étrange et bienheureuse folie de l'espérance.

    Ainsi parla la fourmi amoureuse. Ainsi le roi Salomon découvrit, sur le sentier du désert, le feu de l'amour véritable.

     

    EXTRAITS DU LIVRE D’HENRI GOUGAUD

    « L’arbre d’amour et de sagesse »

     

    (Ici ce termine les contes extraits de ce très beau livre d’Henri Gougaud que je vous conseil  de lire, vivement)

     

     

     


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  • « Rien ni personne ne peut vous apporter

    la paix, le bonheur, la sérénité,

    à part vous-même. »)

    (Emerson)

    « Voilà bien une idée tragique et magnifique : tout ce qui peut nous apporter la paix du cœur transite par notre for intérieur. Les événements favorables ou chargés de promesses peuvent bien sûr y contribuer, mais c'est d'abord dans nos ressources intérieures que nous devons puiser pour parvenir à cet équilibre de l'âme, du corps et de l'esprit. Aucune circonstance, aucune rencontre, aussi positive soit-elle, n'est en mesure de vous plonger dans un ravissement durable si votre cœur est rongé par l'anxiété, la tristesse, la résignation. C'est la qualité du regard que nous portons sur la vie, sur les autres, sur le monde qui peuvent nous conduire à découvrir la beauté de toutes choses, y compris dans des circonstances sombres, difficiles, périlleuses. À nous de nous comporter, par le travail du cœur, en ardents bâtisseurs ou en talentueux restaurateurs... »

     

    « Nous passons beaucoup de moments dans notre vie  à gémir sur le temps présent, à nous plaindre de l'injustice ou de l'incertitude du sort, à critiquer le monde qui nous entoure, à nous alarmer de signes indubitables et fâcheux. Nous appelons cela lucidité, devoir de conscience, sens des responsabilités, esprit critique. Pourtant, ces nobles appellations masquent mal le défaut de notre cuirasse : nous ne grandirons jamais en optant pour le camp des "enténébreurs". L'homme qui possède la richesse du dedans appartient au camp des "réenchanteurs" : il fait prospérer sa vie en semant la joie dans la vie des autres. »

     

    « Le monde appartient aux optimistes.

    Les pessimistes ne sont que des

    Spectateurs. » François Guizot

     

    Le pessimiste assombrit le monde de ses funestes prédictions, en considérant que si le pire n'est jamais sûr, il est en tout cas probable aussi sort-il toujours avec le parapluie de la méfiance, y compris lorsqu'il fait beau. À force d'être sur sa réserve, le pessimiste laisse le monde se faire sans lui : il préfère même s'en faire oublier. L'optimiste, lui, a une vision lumineuse du monde, dont il a décidé de déceler les promesses plus que les menaces, en préférant s'attarder sur l'ouverture des possibles que sur le blocage des situations ou le verrouillage des individualismes. Le pessimisme est repli résigné, l'optimisme est confiance engagée et parfois conquérante. C'est assurément de la douce folie qui berce le cœur des optimistes, mais se priver de cette folie-là, ne serait ce pas péché capital, honteuse capitulation sur le champ de batailles de l'espérance ? Oui, sans cette douce folie, ne serions-nous pas guettés par le racornissement de l'âme ou une déperdition de notre énergie vitale qui nous amèneraient à renoncer à faire de nos rêves des réalités ?

    (François Garagnon)

     

     http://raf-photos.blogspot.com/search/label/Arbres 


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  • La fée des fleurs


    Ici et là, parsemant le sol, quelques flocons de neige...
    La planète bleue, telle un manège,
    Le printemps poursuit dans un incessant tournoiement.
    La nature enfin l'enlace dans un dernier larmoiement.

    "Voici mars!" chuchote le vent aux arbres dénudés.
    "Une mystérieuse renaissance vous ne pourrez éluder."
    À cet heureux présage, la vallée peu à peu reverdit
    Et le ruisseau offre à l'hiver son requiem de Verdi.

    À l'orée du sous-bois, le pluvier s'est posé.
    L'aurore l'accueille dans un scintillement de rosée.
    Timidement les tussilages déploient leurs pétales,
    Tels des topazes qu'un bon magicien étale.

    Au chant nostalgique de la gracieuse tourterelle,
    Sur un lit de fougères s'éveillent les chanterelles.
    Sur la branche du pommier rêve la chrysalide,
    Magnifique papillon de devenir elle est avide.

    Sous la terre du jardin d'impatience elles frémissent
    Ces belles trop longtemps enfouies, du printemps les prémices.
    Tandis que jonquilles, tulipes et muguets de fleurir se languissent
    Délicatement se pose la "Fée des fleurs" sur la narcisse.

    "Mes chères amies les fleurs, combien vous m'avez manqué durant ce long hiver
    Et combien il m'a manqué votre beau feuillage vert!"
    Vêtue d'une incomparable robe aux couleurs translucides d'azur et de soleil,
    Au sein de la corolle du hortensia la "Fée des fleurs" s'éveille.

    "À jamais auprès de vous je veux vivre,
    Vos doux parfums comme un elixir m'ennivrent!
    Quand reverrais-je mes chers amis les papillons et les oiseaux?"
    La brise printaniere lui répond: "Envoles-toi vers la prairie aux grands roseaux!"

    La "Fée des fleurs" étire ses ailes frêles et s'envole vers le grand étang.
    À sa proximité, une hirondelle, puis enfin un roseau lui parler elle entend.
    "Que cherches-tu jolie "Fée des fleurs?" lui demande alors le roseau.
    Et la "Fée des fleurs" de lui répondre: "Mes amis les papillons et les oiseaux."

    "L'hirondelle est déjà de retour. Dans sa petite maison bleue tu la trouveras.
    Quant au beau papillon orangé, sur la branche du lilas il t'attendra."
    La "Fée des fleurs" s'envole alors vers le jardin où les tulipes l'attendent.
    En compagnie des trilles blancs et rouges, allègrement elles bavardent.

    "Enfin,vous voici "Fée des fleurs!" lui disent-elles alors en choeur.
    "Ne nous quittez plus!" À ces mots, la "Fée des fleurs" entre dans leurs coeurs.
    Leur parfum elle respire, leurs pétales si délicates elle caresse.
    Avec tout son amour, un baiser elle leur donne avec tendresse.

    (Laurence Rocheleau www.lespasseurs.com)

     




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  • «Aimer est assurément la meilleure manière de comprendre. Tant il est vrai que l'on ne comprend véritablement que ce que l'on a appris à aimer. Ainsi de la vie : il s'agit moins de chercher à la comprendre que de chercher à l'aimer. De manière inconditionnelle. C'est ainsi que nous finirons par trouver un sens à toutes choses et à découvrir que toutes les choses sont reliées entre elles, les joies comme les peines, les faveurs comme les disgrâces. Rilke avait ces propos un peu énigmatiques et très véridiques : « Efforcez-vous d’aimer vos questions pour elles-mêmes. Peut-être finirez-vous, insensiblement, par entrer un jour dans les réponses »..

     

    « Le sentiment de la justesse d'un acte se traduit par la paix du cœur qui s'installe en nous. Ce que nous accomplissons dans la contrariété, dans le non-acquiescement, dans la réticence, fait que, même si le résultat est atteint, nous passons à côté de l'essentiel. Nous ne devons pas nous contenter de viser une efficience, nous devons chercher la joie du travail accompli avec cœur. « À quoi bon aller sur la lune si nous sommes incapables de franchir l'abîme qui nous sépare de nous-mêmes ? Voilà le plus important de tous les voyages d'exploration et, sans lui, tous les autres sont non seulement vains mais cause de désastre » (Thomas Merton) »

     

    « Nous nous méfions assez souvent du silence, qui peut être gênant, pesant, source de quiproquos, de malentendus ou d'interprétations déformées. Et naturellement, nous remplissons beaucoup l'espace de nos mots. Au risque d'abîmer le silence, qui reste l'espace de prédilection des révélations intérieures et des approfondissements intimes. Maurice Zundel allait jusqu'à dire que "tout ce qui est grand et créateur est formé par le silence". Nous devrions nous familiariser avec le langage du silence, le langage au-delà des mots. Il ne faut pas gâcher le silence avec de menues paroles. Car bien au-delà de la communication se trouve la communion... Comme l'affirmait saint Cyprien : « Dieu n'écoute pas notre voix, mais notre cœur »...

     (François Garagnon)

     


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