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    Les étudiants et le lion 

     

    Quatre étudiants étaient partis sur les routes à la recherche de la fortune. Les trois premiers avaient tant appris qu'ils étaient devenus des savants diplômés, mais il leur manquait un peu de bon sens et d'intelligence pratique. Le quatrième au contraire était très réfléchi et débrouillard, mais peu versé dans les études. 

    En chemin, ils se disputaient sur les valeurs respectives de l'érudition et de l'intelligence. Arrivés dans une forêt, ils aperçurent les ossements d'un lion mort. Les trois savants voulurent alors démontrer au quatrième l'étendue de leur savoir. 

    -  Nous allons lui rendre la vie, affirmèrent-ils. 

    -  Moi, dit le premier, grâce à ma science, j'assemblerai ses os. 

    -  Moi, dit le deuxième, je lui redonnerai sa chair et son sang. 

    -  Moi, dit le troisième, je lui rendrai le souffle de la vie. 

    Et ils se mirent aussitôt au travail. Le premier assembla les os. Le second rhabilla de chair. Mais, au moment où le troisième s'apprêtait à lui redonner la vie, le quatrième essaya de l'en empêcher : 

    -  Ne vois-tu pas que c'est un lion ! Si tu lui redonnes la vie, il va tous nous dévorer ! 

    Mais les trois autres réagirent avec arrogance et l'envoyèrent promener : 

    -  Tais-toi ! Tu n'es qu'un ignorant. Rien ne doit entraver la marche de la science  

    Comprenant que rien ne pourrait les arrêter, le quatrième fila sans tarder se mettre à l'abri au sommet d'un arbre. 

    Quand le lion retrouva la vie, il retrouva aussi la faim. Il se jeta sur les trois érudits et les dévora. Puis il s'éloigna vers sa tanière et le plus futé des quatre put descendre sain et sauf de l'arbre. 

    (‘D'après le Pancatantra, recueil de textes sanskrits du Vie siècle de notre ère) 

    yes

    « Cette fable, parmi les plus anciennes que nous connaissons, montre avec humour que le savoir et l'érudition ne sont rien sans un peu de bon sens... et peuvent même se révéler dangereux. Le savoir serait-il l'ennemi du bon sens, serait-il source parfois d'aveuglement ? Nous qui vivons le temps des experts et des spécialistes (en politique, en science, en économie...) en avons parfois hélas le sentiment. » (Michel Piquemal) 

     


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  • Le mot

    Je suis un mot.
    Fétu de mot dans une phrase en ruisseau
    Que le regard passe. Un mot qui ignore la fête.
    Parfois un enfant m’arrête .Tiens ? tu es nouveau ?
    Et je connais le bonheur, une journée, dans sa tête.

    Je suis parfois aussi celui qui est de trop,
    Un mot évadé de toutes convenances…
    Les phrases modèles me trouvent gros
    Ne m’avez vous crée que pour la prestance ?

    Je suis celui que l’on souffle, que l’on n’ose,
    Aussi aérien qu’un baiser, fragile qu’un espoir,
    Je suis un mot d’amour…oh….si peu de chose…
    Un morceau de soleil, point final de la nuit noire.

    Je me cache aussi parfois au profond du regard,
    Celui que l’on ne dit pas et pourtant d’importance…
    Celui que l’on enterre dans le sol des trop tard…
    Et qui dans la mémoire fait naître la souffrance…

    Je suis né par hasard entre deux bulles de salive
    Tout surpris d’être là, d’être enfin compris…
    D’avoir trouvé écho. Je suis heureux de vivre.
    Longtemps plus tard, un poète m’a écrit.

    Rime

     

     


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  • A côté des autres…


    Je le sais Monsieur, il est bête de croire,
    Que le vent chante au chœur des roseaux,
    Je sais Monsieur, vous tenez pour histoire
    Que le ciel est amoureux fou des oiseaux

    Je le sais Monsieur et je pressens votre sourire,
    Qu’une rose jamais n’aima un papillon,
    Je sais Monsieur…on ne vit nulle part une vague mourir
    Ni enlacer tendrement le goémon

    Je le sais Monsieur, vous nous dites gens inutiles,
    Vendeurs de mots dont vous n’avez nulle envie,
    Je sais Monsieur…Nous sommes puérils,
    A maintenir l’enfant que nous fûmes en vie…

    Je le sais Monsieur, vous tenez pour innocent,
    Celui qui voit bien au-delà de vos regards…
    Je sais Monsieur…il en est mille et cent…
    Mais je me tais Monsieur… je vous mets en retard

    Vous partez Monsieur… Je vous importune
    A m’écouter ainsi, vous en oubliez l’heure…
    Laissez-moi Monsieur…je parlais à la lune
    Et vous passiez innocent à côté d’un bonheur

    Rime


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  • La force du bœuf 

    Un homme avait un bœuf noir d'une force extraordinaire. Son voisin, qui en avait aussi un d'une grande force, aimait les paris. Un jour, au cours d'une foire, devant tous les badauds assemblés, il fit tirer à son bœuf un chariot porteur d'une énorme charge. Puis il s'écria : 

    -  S'il existe un autre bœuf capable de tirer ce char, je donnerai cent pièces d'or à son propriétaire ! Mais, s'il n'y parvient pas, j'empocherai les cent pièces d'or. 

    Le propriétaire du bœuf noir releva aussitôt le défi. Il attela sa bête puis lui cria : 

    -  Allez, force! Tire, feignant! Qu'attends-tu, sale bête, tire donc ! 

    Mais le bœuf noir eut beau forcer et suer, il ne parvint pas à tirer la charge et l'homme perdit ses cent pièces d'or. 

    Quelque temps plus tard, le voisin, enhardi, réitéra son pari. 

    -  Cette fois, dit-il, j'offre mille pièces d'or. Le bœuf noir dit alors à son  

    maître :-  Relève le défi et je te gagnerai cette somme ! 

    -  Comment oses-tu, répliqua son maître, toi qui m'as déjà fait perdre une fois ? 

    Mais le bœuf noir lui répondit : 

    -  Devant une foule nombreuse, tu m'as insulté et humilié, me faisant perdre toute confiance. Encourage-moi et tu verras ce dont je suis capable. 

    Alors le maître brossa son bœuf et orna ses cornes d'une couronne de fleurs. Et, lorsqu'il l'attela, il lui prodigua mille encouragements : 

    -  Porte-moi chance, mon beau ! Je sais que tu en as la force ! Tire, mon ami, tire ce char comme un fétu de paille ! 

    Et, à l'étonnement de tous, le bœuf noir emporta l'énorme charge jusqu'au sommet de la colline.

    (D'après une fable bouddhiste)

    smile

    « Lorsqu’on est humilié, on perd tous ses moyens. Lorsqu’on est encouragé, on arrive à se surpasser. Qui n’en a déjà fait l’expérience ? Bien des siècles avant les recherches en psychologie comportementale, ce conte souligne l’importance du mental sur nos facultés physiques ! (Michel Piquemal) 

    La force du bœuf

     


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  • La vache sur son île 

     

    II était une fois une vache qui vivait sur une île couverte d'une belle herbe grasse et verdoyante. Toute la journée, jusqu'au crépuscule, elle y paissait et engraissait. 

    Mais lors qu’arrivait la nuit noire, elle ne voyait plus les prés couverts d'herbe verte, et elle commençait à s'inquiéter. Que mangerait-elle demain ? Elle allait sans nul doute mourir de faim. Et cette inquiétude la faisait maigrir à vue d'œil. 

    À l'aube, lorsque le jour se levait, elle se remettait à manger de plus belle et à engraisser. Mais lorsque la nuit revenait, la même angoisse la reprenait, la rendant toute maigre et efflanquée. 

     

    (D'après un conte du poète mystique persan Rûmî (1207-1273) 

    « Ne sommes-nous pas tous comme cette vache ? L’inquiétude du lendemain nous ronge et nous attriste. Vivons donc plutôt au présent et profitons des bienfaits de la vie. Mais l’angoisse ne fait-elle pas aussi intégrante de la condition humaine ? N’est-elle pas comme le stress qu’elle engendre, un moteur de vie ? Comment trouver un équilibre entre une insouciance folle et une angoisse qui empêche de vivre ? » (Michel Piquemal)

     


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