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Vieux frère
Mon chat, hôte de ma vieille maison,
De ton dos électrique arrondis la souplesse,
Viens te pelotonner sur mes genoux, et laisse
Que je plonge mes doigts dans ta chaude toison.
Ferme à demi, les reins émus d’un long frisson ;
Ton œil vert qui me raille et pourtant me caresse,
Ton œil vert semé d’or, qui, chargé de paresse,
M’observe d’ironique et bénigne façon.
Tu n’as jamais connu, philosophe, ô vieux frère,
La fidélité sotte et bruyante du chien :
Tu m’aimes cependant, et mon cœur le sent bien.
Ton amour clairvoyant, et peut être éphémère,
Me plaît, et je salue en toi, calme penseur,
Deux exquises vertus : scepticisme et douceur.
Jules Lemaître.
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La fille de l’Auberge
" Il était une fois une fille d'auberge. A l'aube elle lavait le plancher, au soir elle faisait la vaisselle, tout au long du jour elle trottait, servait l'un, accourait à l'autre, souriait comme il le fallait, bien qu'elle fût à tous transparente. Personne ne semblait la voir. On criait à boire, à manger, on claquait des doigts, elle venait. Elle n'avait même pas de nom. Qui était-elle ? La servante. Elle traversa ainsi la vie sans que nul ne se soucie d'elle. Elle mourut. On la mit en terre. Elle s'éveilla au paradis.
Elle ne put en croire ses yeux, d'autant qu'elle ne se trouvait pas au paradis de tout le monde. Elle était au jardin des Saints. " Que suis-je venue faire ici ? Se dit-elle. Je ne suis rien. Je ne peux pas être une Sainte ".
Les Bienheureux vinrent à elles, l’embrassèrent, lui firent fête. Elle leur demanda :
- Pourquoi moi ?
Ils répondirent :
- Dieu le sait.
L'un d'eux lui dit qu'à son avis elle avait aimé ses semblables au point d'en oublier sa vie.
- Aimé ? Oh non ! (Elle osa rire. Jamais encore elle n'avait ri). Je manquais de temps pour cela. J'étais une fille d'auberge. J'avais beaucoup trop de travail.
- Quel est ton nom, ma bonne amie ?
- Je n'en ai pas, répondit-elle. Je n'en ai jamais eu, je crois.
Perplexité des Bienheureux. Ils s'assemblèrent tous à l'ombre du plus vieil olivier du Ciel, en conciliabule pensif.
- C'est anormal. C'est impossible. Comment les gens la prieront-ils ? Il faut qu'elle soit Sainte-Quelqu'un !
Une brise émut le feuillage. Chacun se tut, leva le front.
Vint un murmure. C'était Dieu.
- Elle sera la Sainte sans nom. A elle iront toutes les peines, toutes les prières secrètes qu'on ne sait à qui adresser.
Depuis ce jour, à ce qu'on dit, c'est elle, la fille de rien, l'inconnue de tous en ce monde qui accueille les espérances, les désirs profonds, les soucis que l'on ne peut même pas dire. Ce sont, de tous, les plus nombreux. La sainte servante sans nom n'a pas un instant de repos, mais qu'importe, elle est faite ainsi, toujours à servir, même au Ciel. "
(Henri Gougaud, Le livre des chemins)
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Vivre
Vivre, passionnément
Vivre, timidement
Vivre, en hésitant
Vivre, en souriant
Vivre
Vivre pour être heureux
Vivre, c´est un grand jeu
Vivre
Quand plus rien ne va
Lorsque tout s´en va
Dieu seul sait où
Presque à chaque fois
On se force un peu
Pour, malgré tout,
Vivre le quotidien
Vivre le jour qui vient
Vivre et partir loin
Vivre l´amour sans fin
Vivre
Vivre pour être heureux
Vivre, c´est un grand jeu
Vivre
Quand plus rien ne va
Lorsque tout s´en va
Dieu seul sait où
Presque à chaque fois
On se force un peu
Pour, malgré tout,
Vivre pour un enfant
Vivre seul bien souvent
Vivre matin et soir
Vivre avec l´espoir
De vivre
De vivre pour être heureux
Vivre, c´est un grand jeu
Vivre
Daniel Guichard
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Citations extraites de « Bel Amour et Sainte Espérance
De François Garagnon
« L’homme d’action parle de persévérance
Le sage parle de constance.
Le poète parle du dur désir de durer.
Le contemplatif parle de Sainte Espérance.
- Moi, dit Bel Amour, je te parlerai de tout cela sous ce seul vocable qui en exprime bien d’autres : la fidélité. »
« L’amour, dans ce qu’il a tout à la fois d’universel et d’intemporel, est une graine divine qui fait fleurir la vie depuis toujours et à jamais. Il est la preuve immanente que chaque homme est dépositaire dune parcelle du tout. »
« Si les graines de désir ne donnent pas de floraison, c’est que ton moi les étouffe. »
« Aimer n’est pas vouloir rendre l’autre heureux. C’est d’être heureux, et offrir son bonheur à l’autre. »
« On reconnait l’amour véritable à ce que le silence de l’autre n’est plus un vide à remplir mais une complicité à respecter. »
« La vie est minuscule quand l’amour n’est pas considéré comme capital. »
« L’amour est toujours affaire de cœur, mieux : l’amour est au cœur de la vie. »
« La noblesse de l’amour consiste à respecter l’autre jusque dans ses misères, parce que si l’on considère sa valeur sacrée, on peut dire que ses misères sont un autre nom de sa noblesse. »
« L’amour, pour être complet, doit être à la fois de passion et de compassion. »
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