• L’écureuil

     

    Dans le tronc d'un platane

    Se cache une cabane.

     

    Un petit écureuil

    Est assis sur le seuil.

     

    Il mange des cerises,

    Tricote une chemise ;

     

    Recrache les noyaux,

    Se tricote un maillot ;

     

    Attaque les noisettes,

    Fait des gants, des chaussettes.

     

    Qu'importé s'il fait froid !

    Tant pis si vient l'hiver !

    Une maille à l'endroit,

     

    Une maille à l'envers :

    L'écureuil, fort adroit,

    Se fait des pull-overs.

     

    Jean-Luc Moreau

    ecureuil
     
    (Photos http://raf-photos.blogspot.fr

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    Le dragon

     

    Ces deux amis-là, un beau jour, se promenaient dans la forêt.

    L’un d’eux était aveugle. L’autre le conduisait, il lui tenait la main, fermement, en bon compagnon. Or, voilà que sous les grands arbres apparaît soudain un dragon, une sorte de monstre informe, énorme, griffu, grimaçant.

    - Seigneur Dieu, dit celui qui voit, oh malheur, nous sommes perdus !

    Il s’arrête, la bouche ouverte, se serre contre son ami.

    - Qu’as-tu vu ? demande l’aveugle.

    - Un monstre épouvantable, entre les arbres, là, il bouge avec la brume. Oh ses ailes ! Oh ses yeux !

    - Est-il fait de vraie chair vivante ?

    - Je ne sais pas, il va, il vient, il se défait, se recompose, il s’éloigne, non, il grandit !

    - Ferme les yeux, lui dit l’aveugle, et donne-moi la main. Allons.

    Ils marchent droit sur le dragon. Le corps de la peur se défait.

     

    (Henri Gougaud, L’Almanach) 

     

     

    20050500 Québec Montréal_1921

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  • Tu as peur

     

    Tu as peur

    Fais-en un dessin

    Qui cerne un loup de papier.

     

    Tu as mal

    Un sanglot noué

    Fais-en une musique

    Qui descende en cascade sur les cailloux

     

    Tu es seul

    Fais-en un poème

    Qui partage la nuit

    En battant, vivant, vivant, vivant.

     

    Catherine Leblanc

    sur la route de Tautavel 1

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  • La plaine, les vallons plus loin…

     

    La plaine, les vallons plus loin,

    Les bois, les fleurs des champs,

     

    Les chemins, les villages,

    Les blés, les betteraves,

     

    Le chant du merle et du coucou

    L'air chaud, les herbes, les tracteurs,

     

    Les ramiers sur un bois,

    Les perdrix, la luzerne,

     

    L'allée des arbres sur la route,

    La charrette immobile,

     

    L'horizon, tout cela

    Comme au creux de la main.

     

    Eugène Guillevic

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  • Extraits de « Quand la conscience s’éveille »

    D’Antony de Mello

     

    Toute l'œuvre d'Anthony de Mello (1931-1987), prêtre jésuite indien qui fit également profession de psychologue et psychothérapeute, est consacrée à la libération intérieure. Quand la conscience s'éveille se présente comme un recueil d'histoires courtes, de fables ou de paraboles qui, influencées par les spiritualités bouddhiste ou taoïste, tracent les voies d'une sagesse originale et efficace.

    S'appuyant sur son expérience d'animateur de retraites spirituelles, Anthony de Mello s'adresse ici directement à son lecteur, dans un style vif et familier. Il aborde les thèmes essentiels qui l'éclairent sur l'éveil à soi, condition d'harmonie intérieure et de bonheur. Il le poursuit jusque dans ses derniers retranchements psychologiques avec une perspicacité teintée d'ironie et de tendresse.

    Ce livre sera un compagnon de route précieux pour qui veut cheminer vers la connaissance de soi.

    « Vous voulez changer le monde ? Pourquoi ne pas commencer par vous changer vous-mêmes ? Pourquoi ne pas vous transformer d’abord ? Mais comment y arriver ? Par l’observation. Par la compréhension. Sans intervenir personnellement, sans porter de jugement. Lorsqu’on juge, on est incapable de comprendre. »

     

    « Aucun jugement, aucun commentaire, aucune attitude critique : il s’agit tout simplement d’observer, d’étudier, de regarder sans le moindre désir de changer ce qui est. Lorsque vous essayer de transformer ce qu’est un être ou une chose en ce que vous pensez qu’il ou elle devraient être, vous cessez de comprendre. »

     

    « Lorsqu’on est conscient d’une chose, on peut prendre le contrôle sur cette chose. Lorsqu’on n’est pas conscient d’un sentiment, c’est lui qui a le contrôle sur vous. On est toujours l’esclave de ce dont on n’est pas conscient. C’est en prenant conscience d’un sentiment qu’on s’en libère. Il est toujours là, mais on n’est plus atteint par lui. On n’est plus sous son influence, on n’est plus son esclave. C’est cela la différence. »

     

    « Le bonheur est un état naturel. Le bonheur est l'état naturel des petits enfants, à qui le royaume appartient jusqu'à ce qu'ils soient contaminés et souillés par la stupidité de la société et de la culture. Il n'y a rien à faire pour acquérir ce bonheur, car il ne peut être acquis. Quelqu'un peut-il me dire pourquoi? Parce que nous le possédons déjà. Comment pourrions-nous acquérir ce que nous possédons déjà? Et puisque nous le possédons, pourquoi ne pas l'utiliser? Parce que pour 'utiliser nous devons laisser tomber quelque chose; nous devons laisser tomber nos illusions. Il n'est pas nécessaire d'ajouter quoi que ce soit à nos vies pour être heureux, il suffit de laisser tomber quelque chose. La vie est facile, la vie est délicieuse. Elle n'est dure que pour vos illusions, vos ambitions, votre cupidité, vos désirs insatiables. »

     

    « Je pense à ce prisonnier irlandais qui avait creusé un tunnel sous le sol de sa cellule afin de s'évader Il arrive en plein milieu d'une cour d'école où jouent des petits enfants. Lorsqu'il sort du trou, il ne peut s'empêcher de manifester sa joie et commence à sauter et à crier «Je suis libre, je suis libre, je suis libre! Alors une pente fille vient à lui et, de toute sa hauteur, lui dit: «Ce n’est rien, ça ! Moi, j'ai quatre ans. »

    « Imaginez que vous regardez des arbres et des montagnes à travers une fenêtre balayée par la tempête. Tout vous semble flou et informe. Vous voudriez sortir et changer ces arbres et ces montagnes. Mais attendez! Examinez d'abord votre fenêtre- Lorsque la tempête est finie et que cesse la pluie, vous regardez à nouveau par cette fenêtre et vous vous dites: «Comme tout paraît différent!» Nous ne voyons pas les gens et les choses comme ils sont, mais en fonction de nous. C'est la raison pour laquelle deux personnes regardant la même chose ou la même personne ont des réactions différentes. Nous ne voyons pas les choses et les gens comme ils sont, mais en fonction de ce que nous sommes. »

     

    « Dire non aux autres est merveilleux, cela fait partie du réveil, c’est vivre sa vie comme on l’entend. Comprenez bien que cette attitude n’est pas égoïste. Ce qui est égoïste, c’est d’exiger que les autres vivent leur vie comme vous l’entendez. C’est cela l’égoïsme. Il n’y a rien d’égoïste à vivre sa vie comme on l’entend. L’égoïsme consiste à exiger d’une autre personne qu’elle vive selon vos goûts, ou pour votre profit, ou pour votre fierté, ou pour votre plaisir. Voilà une attitude tout à fait égoïste. »

     

    « Parlons par exemple de l’illusion, de l’erreur de jugement qui consiste à croire qu’en changeant le monde extérieur vous changerez. Vous ne changerez pas si vous nous contentez de changer votre monde extérieur ; vous ne changerez pas en changeant de métier, de conjoints, de maison, de gourou ou de religion. Croire cela équivaut à croire que l’on change d’écriture en changeant de crayon. Ou que l’on modifie sa capacité de réfléchir en changeant de chapeau. Ces choses-là, ne changent rien à ce que vous  êtes. Et pourtant la plupart des gens gaspillent toute leur énergie à réaménager leur monde extérieur selon leurs changements de goût. Ils y arrivent parfois – pour  cinq minutes – et ont ainsi un peu de répit, mais ils restent tendus néanmoins car pendant ce temps-là, la vie continue à s’écouler, la vie continue à changer. »

     

    « La beauté d’une action ne procède pas de l’habitude que l’on a de la poser, mais de la sensibilité, de la conscience, de la clarté de la perception et de la précision de la réaction qui nous habitent lorsqu’on la pose. »

     

    « Plus vous essaierez de changer, plus vous vous embourberez. Cela veut-il dire qu'un certain degré de passivité est souhaitable? Oui, car plus vous résistez à une chose, plus vous lui donnez du pouvoir. On augmente le pouvoir du mal que l'on combat. C'est une attitude très orientale. Mais si vous ne résistez pas à l'ennemi, vous finirez par le dépasser. Comment affronter le mal? En le comprenant, pas en le combattant. Il disparaît lorsqu'on l'a compris. Comment affronter l'obscurité ? Certainement pas avec les poings. On ne chasse pas l'obscurité d'une chambre avec un balai, on ouvre la lumière. Plus on lutte contre l'obscurité, plus elle devient épaisse, et plus on se fatigue. Mais lorsqu'on ouvre la lumière de la conscience, l'obscurité se dissipe. »

    SAM_0273

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