3 Mars 2011
Alors que nous nous promenions sur les hauteurs de l'île, nous aperçûmes dans le lointain un homme en armure. Inquiets, nous nous apprêtions à rebrousser prudemment chemin, mais Sophios nous contraignit à aller au devant de cet être effrayant... qui se révéla être un apiculteur, emmitouflé dans ses vêtements de protection. Alors Sophios composa à notre intention cette petite fable:
Le lapin, la belette et l’aigle
Un lapin, qui n'avait pas vu grand-chose dans son existence, rencontra un jour un troupeau de vaches. Lorsqu'il vit ces énormes bêtes pourvues de terribles cornes luisantes comme des poignards, il détala à toutes pattes. À n'en pas douter, c'étaient là des monstres dangereux dont il devait bien se garder. Plus loin, à bout de souffle, il rencontra une belette. Elle semblait sommeiller sur une pierre au soleil. Elle était si gracieuse avec son fin museau, et si attirante avec sa fourrure soyeuse, qu'il s'approcha en toute confiance pour jouer avec elle. La belette, elle, le guettait du coin de l'œil, prête à lui sauter à la gorge. Mais un aigle qui volait dans le ciel avait vu la belette. Cela faisait déjà quelques minutes qu'il décrivait autour d'elle de larges cercles. Et au moment même où la belette tournait vers le lapin ses dents meurtrières, l'aigle lui fondit dessus et l'emporta. Puis il s'envola majestueusement vers le ciel dans le soleil couchant. Le jeune lapin admira le vol puissant, l'allure noble de celui qui lui avait sauvé la vie. «Je sais désormais qui sont mes amis, se dit-il. Ce sont ces grands oiseaux qui gouvernent le ciel.» Hélas, s'il avait su combien il ne faut pas juger les gens sur les apparences ! Cela lui aurait évité de servir plus tard de déjeuner à quelque jeune aiglon..