27 Avril 2014
Les grenouilles
Par brusques détentes, elles exercent leurs ressorts.
Elles se posent, presse-papier de bronze,
sur les larges feuilles du nénuphar.
L’une se gorge d’air. On mettrait un sou,
par sa bouche, dans la tirelire de son ventre.
Elles montent, comme des soupirs, de la vase.
Assises en tailleur, stupéfiées,
elles baillent au soleil couchant.
Puis comme des camelots assourdissants des rues,
elles crient les dernières nouvelles du jour.
Il y aura réception chez elles ce soir ;
Les entendez-vous rincer leurs verres ?
Parfois, elles happent un insecte.
Et d’autre ne s’occupent que d’amour.
Et toutes, elles tentent le pécheur à la ligne.
Jules Renard « Le sourire de Jules