9 Février 2012
« Si le Christ, demain, frappe à votre porte,
Le reconnaîtrez-vous ? Ce sera, comme jadis, un homme pauvre, sûrement un homme seul.
Ce sera sans doute un ouvrier,
Peut-être un chômeur,
ou même, si la grève est juste, un gréviste.
Ou bien encore il placera des polices d'assurances.
ou des aspirateurs...
Il montera sans fin, sans fin, des escaliers,
s'arrêtera sans fin sur des paliers,
avec, sur son visage triste,
un merveilleux sourire...
Mais votre seuil est si sombre...
Et puis on ne voit pas le sourire des gens
qu'on veut renvoyer.
« Ça ne m'intéresse pas... » Direz-vous
avant de l'entendre.
Ou bien la petite bonne répétera, comme une leçon
« Madame a ses pauvres »
et claquera la porte
sur le visage du Pauvre
qui est le Sauveur.
Ce sera peut-être un réfugié,
un des quinze millions de réfugiés
avec un passeport de l'ONU ;
un de ceux dont personne ne veut
et qui errent,
qui errent dans ce désert qu'est devenu le monde ;
un de ceux qui doivent mourir
« parce qu'après tout on ne sait pas d'où viennent
les gens de cette sorte... »
Ou bien encore, en Amérique,
un Noir,
un nègre, comme ils disent,
las de mendier un gîte dans les hôtels de New York,
comme jadis, à Bethléem,
la Vierge Notre-Dame...
Si le Christ, demain, frappe à votre porte, Le reconnaîtrez-vous ?
Il aura l'air accablé,
épuisé,
écrasé qu'Il est
parce qu'il doit porter
toutes les peines de la terre...
Voyons !... On n'emploie pas un homme si fatigué.
Et puis, si on Le questionne :
« Que sais-tu faire ? »
II ne peut pas répondre : tout.
«D'où viens-tu?»
Il ne peut pas répondre : de partout.
« Que prétends-tu gagner ? » II ne peut pas répondre : vous.
Alors Il s’en ira,
Plus épuisé, plus écrasé,
Avec la Paix dans ses mains nues »
(Raoul Follereau)