• L’écho ne nos paroles 

     

    Un jeune berger emprunta un jour un nouveau sentier avec son troupeau. Il lui sembla alors entendre le bruit de sonnailles d'un autre troupeau. Cela le remplit de joie, car il avait bien envie de se faire un ami. Il appela : 

    -  Qui est là? 

    Et il entendit aussitôt d'autres voix répondre : 

    -  Qui est là ? Qui est là ? Qui est là ? 

    Il y avait donc d'autres bergers comme lui dans la vallée. 

    Il s'écria alors : 

    -  Où êtes-vous, je ne peux pas vous voir ! Et les voix répondirent : 

    -  Pas vous voir, pas vous voir, pas vous voir ! 

    Cela le mit en colère. Les autres bergers se cachaient et se moquaient de lui. Il leur cria : 

    -  Montrez-vous, imbéciles ! Et les voix répondirent : 

    -  Imbécile, imbécile, imbécile ! 

    Cela lui fit un peu peur. Il n'était pas de taille à lutter contre tous ces bergers. Il rassembla bien vite son troupeau et rentra à la maison. Son grand-père, le voyant revenir tout en sueur, le questionna : 

    - Qu'y a-t-il, mon petit ? On dirait que tu as vu le diable dans la vallée ! Le jeune garçon lui raconta sa mésaventure. Il lui parla de tous ces bergers qui se cachaient, prêts à l'attaquer. Le grand-père comprit que l'enfant; s'était fait peur tout seul, en entendant l'écho de sa propre voix... et il le rassura. 

    - Ces bergers-là ne te veulent pas de mal. Ils attendent seulement de toi une phrase amicale. Demain, lorsque tu retourneras dans les pâturages, commence par leur dire bonjour. 

    Le lendemain, lorsqu'il atteignit le fond de la vallée, le jeune berger cria joyeusement : 

    -  Bonjour ! 

    Et l'écho répondit : 

    -  Bonjour, bonjour, bonjour ! Il ajouta : 

    -  Je suis votre ami ! Et l'écho reprit : 

    -  Ami, ami, ami ! 

    Alors la peur quitta le cœur de l'enfant. Il comprit que chaque fois qu'il disait des paroles gentilles, les voix lui répondaient de même. Et, lorsqu'il devint adulte, il garda toujours en mémoire cette leçon. 

    (D'après un conte hindouiste) 

     « Si l’on va vers les autres le cœur plein d'agressivité, ils nous répondent par leur violence, mais si l’on va vers les autres avec confiance, ils y répondent comme en écho. Le regard qu'on porte sur eux les modifie. L'amour engendre l'amour, et la haine, la haine. En avez-vous déjà fait l'expérience ? Sinon, il est temps d'essayer cette recette de vie.(Michel Piquemal)  


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  • Le cheval d’ Al-Mamun 

     

    Le calife de Bagdad, nommé Al-Mamun, possédait un magnifique cheval arabe. Un membre d'une tribu nommé Omah était désireux d'acheter ce cheval ; il offrit plusieurs chameaux en échange, mais Al-Mamun ne voulait pas se départir de son cheval. Cela rendit Omah tellement furieux qu'il décida d'acquérir le cheval par la ruse. Informé qu'Al-Mamun devait passer à cheval sur une certaine route, il se coucha le long de celle-ci, déguisé en mendiant très malade. Or Al-Mamun était un homme au cœur tendre. À la vue du mendiant, il fut pris de pitié, descendit de cheval et offrit à l'homme de l'emmener. Il le souleva doucement, le plaça sur son cheval, avec l'intention de monter avec lui. Mais, dès qu'il fut en selle, le faux mendiant partit au galop tandis qu'Al-Mamun courait après lui et lui criait d'arrêter. Quand il fut à une distance suffisante de son poursuivant, le voleur s'arrêta et regarda en arrière. 

    -  Tu m'as dérobé mon cheval, cria Al-Mamun, j'ai une faveur à te demander. 

    -  Laquelle ? cria l'autre. 

    -  Que tu ne dises à personne comment tu as acquis ce cheval. 

    -  Et pourquoi ? 

    -  Parce qu'un jour, quelqu'un de réellement malade peut être couché le long de la route et, si ton stratagème est connu, les gens passeront près de lui sans lui porter secours. 

    (Anthony De Mello (1931-1987),

     

    « Le fait de savoir qu’il y a des gens capables du pire empoisonne notre société. 

    On ne laisse pas sa maison ouverte de peur d'être cambriolé. On n'autorise pas les enfants à jouer dans la rue. On n'ose pas faire confiance à un inconnu. On n'accueille pas un étranger... Tout ce qui ferait de nous des êtres humains insouciants et généreux est contrecarré par la peur. Pourtant, n'y a-t-il pas cent fois plus de gens honnêtes que de malhonnêtes ? À force de mettre constamment en scène la violence, les médias ne portent-ils pas une responsabilité dans la déshumanisation de notre société ?(Michel Piquemal) »  

    (Argentine)

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  •  DE MICHEL PIQUEMAL 

     

    Le fiancé choisi

     

    Une merveilleuse fille de roi était en âge de se marier. Mais elle avait 

    décidé d'épouser l'homme qui serait à la fois le plus riche et le plus pauvre 

    du monde ! Son père, qui l'adorait, trouva ses propos étranges, mais accepta qu'il fût fait selon son désir.  

    Le   premier   prétendant   déversa devant la fille du roi des coffres de diamants, des soies, des fourrures, 

    de la vaisselle d'or et d'argent.- Mes richesses sont innombrables, 

    déclara ce beau prince, mais je suis l'homme le plus pauvre tant que je 

    ne possède pas le précieux trésor de ton amour. La jeune fille secoua la tête et le refusa. 

    Le deuxième prétendant était un guerrier. 

    -  Ma  seule  richesse,   c'est mon sabre, annonça-t-il. Mais, grâce à lui, je ferai pour toi la conquête du monde. La jeune fille secoua la tête et le 

    refusa. 

    Le troisième prétendant se présenta en habits simples et les mains vides. 

    -  Je vois ta pauvreté, dit le roi. Mais où est ta richesse ? 

    -  Voilà ma richesse, répondit-il en tendant ses mains nues. Ces mains peuvent  forger,   tisser,   marteler, peindre, couper. Je n'ai qu'elles, mais elles me rendent riche de mille savoirs. 

    La fille du roi s'exclama : 

    -  C'est le fiancé que j'attendais ! C'est lui, je le choisis. 

    Et elle épousa le jeune artisan. 

     (D'après un conte d'Asie Centrale) 

    Selon ce conte, la vraie richesse est la capacité à savoir travailler de ses mains. Pensez-vous que cette morale soit toujours d’actualité ou bien totalement dépassée aujourd’hui ? (Michel Piquemal)  

     


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  •  « LES PHILO-FABLES POUR VIVRE ENSEMBLE » 

     DE MICHEL PIQUEMAL 

     

    Diogène et l’enfant 

    Le philosophe grec Diogène ne possédait, dit-on, qu'une simple écuelle de bois qui lui servait pour boire et pour manger. Mais   un   jour   qu'il   passait devant une fontaine, il vit un enfant en train de boire dans le creux de ses mains. Il jeta aussitôt son écuelle en s'écriant :  

    - Cet enfant est plus avancé que moi dans l'art de vivre en philosophe ! 

    (D'après la tradition antique) 

     «Nous retrouvons avec Diogène l’idée que tout ce que l’on possède  nous possède en retour et fait obstacle à notre liberté. (Michel Piquemal) » 

     

     


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  • L’obstacle du moi 


     

    tacle qu'un homme ait à franchir pour avancer sur le chemin de la sagesse, il répondait : 

    - C'est lui-même. Le moi est le plus difficile à franchir. 

    Et, lorsqu'on lui demandait comment il avait compris cela, il répondait qu'un chien le lui avait enseigné. 

    - Un jour, disait-il, je vis un chien qui mourait de soif alors qu'il était au bord même d'une rivière. Car il voyait dans l'eau son propre reflet qu'il prenait pour un autre chien. Il aboyait, puis s'enfuyait sans avoir bu devant l'image de cet autre chien montrant les crocs. À la fin, pourtant, la soif lui fit perdre toute retenue. Il se jeta à l'eau et l'autre chien qui faisait obstacle disparut. 

     (D'après le poète persan Farid al-Dîn Attâr (v. 1119-v. 1220),Le Livre divin) 

    Pour atteindre la sagesse, nous dit le poète persan Attâr, il faut passer par-delà le moi, c'est-à-dire par-delà notre petite personne, nos petits égoïsmes, nos passions... En s'oubliant un peu soi-même, on s'ouvre aux autres, première étape vers la sagesse. 

    Mais doit-on pour autant s'oublier complètement? Sans doute pas... Ce serait là la quête d'un saint. (Michel Piquemal) 

     


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  • Un partage équitable

     

    Deux frères avaient à se répartir les biens de leur père mort, mais ils n'arrivaient pas à se mettre d'accord. Des avocats et des juges s'en étaient mêlés. Aucun n'était parvenu à leur trouver un arrangement. 

    On alla donc voir un saint homme réputé pour sa sagesse, et on lui exposa le problème. 

    - C'est fort simple, leur dit-il. Que l'aîné partage les biens en deux parts ; et que le cadet choisisse en premier. De la sorte, aucun des deux ne pourra se sentir lésé. 

    Sa procédure parut si astucieuse qu'on prit désormais l'habitude de l'appliquer chaque fois qu'il y avait un litige. 

    (D'après un conte français) 

    Voilà une procédure fort habile. Personne ne peut ainsi se plaindre ! Ni le premier, puisque c'est lui qui a fait les parts, ni le second, puisque c'est lui qui a choisi ! On remarquera que le sage réussit là où juges et avocats ont échoué. (Michel Piquemal)  


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  • Sans cligner des yeux 

     

    Au Moyen Âge, une guerre ravagea l'ancien Japon. Durant ces affrontements meurtriers, une armée envahit une ville qui était restée fidèle à son seigneur. Tous les habitants avaient fui, y compris les moines du temple zen. Seul le vieux maître était resté. Quand le général rebelle pénétra dans le temple, il fut reçu d'un ton glacial. Furieux, il porta la main à son sabre et lança au vieux maître : 

     Savez-vous que vous avez face à vous un homme capable de vous pourfendre sans même cligner des yeux ? 

    - Et vous, répliqua le maître avec calme, savez-vous que vous avez face à vous un homme prêt à être pourfendu sans même cligner des yeux ? 

    Le général prit le temps de la réflexion, puis il s'inclina et se retira. 

    (D'après un apologue zen) 

     

    « Ce conte montre la puissance de la non-violence. La force ne peut rien face à ceux qui sont moralement déterminés. La violence ne peut rien devant ceux qui n’ont pas peur, même de mourir. (Michel Piquemal)  


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  • La fin du monde 

     

    Un beau matin, un petit lapin sortit de bonne heure de son terrier et vit le soleil qui rougissait, pareil à une énorme boule de feu à l'horizon. Comme il n'était pas bien réveillé, cette énorme lueur l'effraya. « Et si la terre était en feu ? Et si c'était la fin du monde ? » Juste à ce moment-là, une pomme tomba de l'arbre et le bruit lui sembla un coup de tonnerre. Il ne lui en fallut pas plus. Aussitôt, il détala à toute vitesse en s'écriant : - Au secours ! Au secours ! C'est la fin du monde ! 

    Alors tous les autres lapins se mirent à courir, entraînant dans leur course les autres animaux qu'ils croisaient. 

    -Où allez-vous? Où allez-vous? Demandèrent les cerfs, les sangliers et les buffles. 

    - Vite, vite, il faut fuir ! La terre est en feu ! C'est la fin du monde ! 

    Et le troupeau des bêtes affolées grossissait sans cesse, galopant vers l'ouest, cherchant à échapper à on ne sait quel péril. Dans leur course effrénée, ils croisèrent le lion, roi des animaux. Avec sa voix de tonnerre, celui-ci réussit enfin à les arrêter : 

    - Où allez-vous tous ainsi ? 

    -Seigneur, laissez-nous, murmura une bête. Il faut fuir. C'est la fin du monde.                      

    - Qui a dit cela ?                                                            ! 

    - On l'a vu, Seigneur ! 

    - Qui l'a vu ? 

    Alors le petit lapin osa s'avancer : 

    - Moi, Majesté. En sortant de mon terrier, j'ai vu une grande lueur et entendu un grand bruit. 

    Le lion calma les esprits et amena toutes les bêtes jusqu'au terrier du lapin. 

    À ce moment-là, une nouvelle pomme tomba de l'arbre, faisant sursauter le petit lapin. 

    -C’est donc cela, ta fin du monde ? 

    Et toutes les bêtes rirent de bon cœur. 

    Mais le lion leur fit la leçon : 

    La prochaine fois, vous tous, ne croyez que ce que vous voyez de vos propres yeux. 

    (d’après un conte bouddhique, raconté par Thalie de Molènes)  

     

     

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  • « LES PHILO-FABLES POUR VIVRE ENSEMBLE » 

     DE MICHEL PIQUEMAL 

     

     

    Pourquoi le ciel est loin ? 

    Au temps jadis de jadis, le ciel était à portée de nos mains, et c'était quelque chose de merveilleux. En effet, les hommes n'avaient pas besoin de travailler pour se nourrir. Quand ils avaient faim, ils attrapaient un petit bout de ciel et ils le mangeaient. 

    Mais un jour, le ciel se fâcha car les hommes ne le respectaient plus. Ils se coupaient souvent de grands morceaux de nuage ou de Lune qu'ils ne finissaient même pas et qu'ils jetaient aux ordures. Le ciel les avertit : s'ils continuaient à le gaspiller, il s'en irait ! Les hommes, un peu impressionnés, lui prêtèrent à nouveau attention. Mais les années passèrent et l'avertissement du ciel ne fut plus qu'une lointaine parole. 

    Un jour, une femme vorace se coupa un énorme morceau de ciel. Elle en mangea toute la journée, mais elle ne parvint pas à le terminer. Elle appela son mari, mais il ne put pas le finir lui non plus. Elle appela alors toutes ses amies et tous les villageois, mais rien n'y fit... En désespoir de cause, ils jetèrent discrètement ce qu'il en restait aux ordures. Or le ciel avait tout vu et sa colère était sans pareille. Il s’éleva aussitôt très haut, très haut … et il disparut à la vue des hommes. 

    C’est depuis ce temps que les hommes doivent cultiver le sol et travailler pour se nourrir ! 

                                               (D’après un conte africain) 

     


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