• Dors

    Dors, mignon chat blanc, dors

    Reste à ronronner, reste couché,

    Et ferme un peu tes yeux semés d'or ;

    Les souris montrent leur nez aux trous du plancher.

     

    Dors, mignon chat blanc, mignon chat gris, Avec ton ruban de soie au cou ; Les souris vont venir, les jolies souris Que tu griffes à petits coups.

     

    Elles vont s'attabler autour

    De la bonne assiette au gâteau :

    Dors, mignon chat blanc à pattes de velours,

    Et ne t'éveille pas trop tôt.

     

    Tristan Klingsor

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  • Un chat perdu

     

    Un chat perdu rôdait

    Aux portes des maisons.

    Une vieille cousait,

    Assise à son balcon.

     

    « O vieille ! dit le chat,

    Je vis de peu de chose :

    Deux pétales de rose

    Comblent mon estomac. »

     

    « En ce cas, dit la vieille

    Entrez, pauvre matou ;

    Dormez dans ma corbeille,

    Faites comme chez vous. »

     

    Mais allez croire un chat !

    Dès qu’il fut chez la vieille,

    Il lui mangea jusqu’à

    L’ouate de ses oreilles.

    Maurice Carême

     

    chat 2199

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  • Presse papier

     

    C’est un petit chat noir, effronté comme un page.

    Je le laisse jouer sur ma table, souvent,

    Quelquefois il s’assied sans faire de tapage ;

    On dirait un job presse-papier vivant.

     

    Rien de lui, pas un poil de sa toison ne bouge.

    Longtemps, il reste là, noir sur un feuillet blanc,

    A ces matous, tirant leur langue de draps rouge,

    Qu’on fait pour essuyer les plumes, ressemblant.

     

    Mais le voilà qui sort de cette nonchalance,

    Et faisant le gros dos, il a l’air d’un manchon ;

    Alors, pour l’intriguer un peu, je lui balance,

    Au bout d’une ficelle invisible, un bouchon.

     

    Il fuit en galopant et la mine effrayée,

    Puis revient au bouchon, le regarde, et d’abord

    Tient suspendue en l’air sa patte repliée,

    Puis l’abat, et saisit le bouchon, et le mord.

     

    Je tire la ficelle, alors, sans qu’il la voie ;

    Et le bouchon s’éloigne, et le chat noir le suit,

    Faisant des ronds avec sa patte qu’il envoie,

    Puis saute de côté, puis revient, puis s’enfuit.

     

    Mais dès que je lui dis : « Il faut que je travaille ;

    Venez-vous asseoir là, sans faire le méchant ! »

    Il s’assied … Et j’entends, pendant que j’écrivaille,

    Le petit bruit mouillé qu’il fait en se léchant.

     

    Edmond Rostand

     

    scan278

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  • Quel secret dort

     

    Chatte blanche, chatte sans tache,

    Je te demande, dans ces vers,

    Quel secret dort dans tes yeux verts,

    Quel sarcasme sous ta moustache.

     

    Tu nous lorgnes, pensant tout bas

    Que nos fronts pâles, que nos lèvres

    Déteintes en de folles fièvres,

    Que nos yeux creux ne valent pas.

     

    Ton museau que ton nez termine,

    Rosé comme un bouton de sein,

    Tes oreilles dont le dessin

    Couronne fièrement ta mine.

     

    Pourquoi cette sérénité ?

    Aurais-tu la clé des problèmes

    Qui nous font frissonnants et blêmes,

    Passer le printemps et l'été ?

     

    Devant la mort qui nous menace,

    Chats et gens, ton flair, plus subtil

    Que notre savoir, te dit-il

    Où va la beauté qui s'efface,

     

    Où va la pensée, où s'en vont

    Les défuntes splendeurs charnelles ?...

    Chatte, détourne tes prunelles ;

    J'y trouve trop de noir au fond.

     

    Charles Cros

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  • Chats de partout

     

    Je suis le chat de cimetière,

    De terrain vague et de gouttière,

    De Haute-Egypte et du ruisseau

    Je suis venu de saut en saut.

     

    Je suis le chat qui se prélasse,

    A l’instant où le soleil passe,

    Dans vos jardins et dans vos cours

    Sans avoir patte de velours.

     

    Je suis le chat de l’infortune,

    Le trublion du clair de lune

    Qui vous réveille dans la nuit

    Au beau milieu de vos ennuis.

     

    Je suis le chat des maléfices

    Condamné par le Saint Office ;

    J’évoque la superstition

    Qui cause vos malédictions.

     

    Je suis le chat qui déambule

    Dans vos couloirs de vestibules,

    Et qui fait ses petits besoins

    Sous la porte cochère du coin.

     

    Je suis le félin bas de gamme,

    La bonne action des vieilles dames

    Qui me prodiguent le ron-ron

    Sans souci du qu’en dira-t-on.

     

    Epargne-moi par vos prières

    Le châtiment de la fourrière

    Où finissent vos émigrés

    Sans demeure et sans pedigree.

     

    Henri Monnier,

    chat 2191

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  • scan222

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  •  

    Chatons dans tous les coins

     

    Chatons, chatons dans tous les coins,

    Chatons mâchonnant  mes lorgnons,

    Chatons griffant mes pantalons,

    Chatons partout sous les cousins,

    Un chaton derrière, un chaton devant …

    Comment seront-ils donc, quand ils seront grands ?

     

    Chatons qui bataillent en tout lieu,

    Chatons qui roulent le long des escaliers,

    Un chaton sur ma tête,

    Un chaton sur la galette,

    Un chaton dans mon soulier…

    Je ne peux pas le croire : ils ne sont que deux !

     

    William Wondsworh

    scan312

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  •  

    Vieux  frère

    Mon chat, hôte de ma vieille maison,

    De ton dos électrique arrondis la souplesse,

    Viens te pelotonner sur mes genoux, et laisse

    Que je plonge mes doigts dans ta chaude toison.

     

    Ferme à demi, les reins émus d’un long frisson ;

    Ton œil vert  qui me raille et pourtant me caresse,

    Ton œil vert semé d’or, qui, chargé de paresse,

    M’observe d’ironique et bénigne façon.

     

    Tu n’as jamais connu, philosophe, ô vieux frère,

    La fidélité sotte et bruyante du chien :

    Tu m’aimes cependant, et mon cœur le sent bien.

     

    Ton amour clairvoyant, et peut être éphémère,

    Me plaît, et je salue en toi, calme penseur,

    Deux exquises vertus : scepticisme et douceur.

     

    Jules Lemaître.

     

    chat 9

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  • Toilette

     

    À l'œuvre maintenant ! Toilette et gratterie

    L'absorbent tout entier.  Le chat,

    Si propre tel qu'il est, si bien peigné déjà,

    Se lisse avec coquetterie.

     

    Que par hasard un poil se colle sur sa langue,

    Pour l'avaler, le miauleur

    Grimace en mâchonnant, fait comme un beau parleur

    Qui s'empêtre dans sa harangue.

     

    A piochement de tête onduleux, brusque et drôle,

    II se râpe le bas du cou ;

    Des griffes et des dents il insiste beaucoup

    Aux démangeaisons de l'épaule.

     

    Son opération, d'un arrêt s'entrecoupe :

    II tend son regard et son flair,

    Et le col et les reins en arc, et la cuisse en l'air,

    Lèche les abords de sa croupe.

     

    Sans voir ce que la pluie en tapotant gribouille

    Sur la crasse de son carreau,

     

    II humecte longtemps le caoutchouc noiraud

    De sa patte, et se débarbouille.

     

    Éveillée à présent, mutine se détache

    Sur un fond d'ombre vague aux clairs-obscurs tremblants,

    Sa frimousse qui montre espacés et tout blancs

    Les poils raides et droits lui servant de moustache.

     

    Mais la pluie a cessé. Quelqu'un entre soudain.

    Le matou sort d'un bond, gagne cour et jardin,

    Et bientôt on le voit marchant à pas tranquilles

    Au long du vieux chenal, sur la mousse des tuiles.

     

    Maurice Rollinat,

     

    chat 2216

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  • 013

    La lune

     

    Dans la nuit qu'elle argente avec son regard blanc,

    Faisant hurler les chiens et chanter les poètes,

    La lune pend, légère, ainsi qu'un cerf-volant.

     

    Au milieu des tuyaux longs et des girouettes

    Qui dentellent les toits blancs de leur profil noir,

    Chagrine, elle poursuit les chattes inquiètes,

     

    En guettant les matous lascifs qui vont s'asseoir

    Au bord de la gouttière, elle monte la garde

    Devant ces diamants, les étoiles du soir.

     

    Voici l'astre aux blancheurs métalliques qui farde

    De craie, au fond du ciel, son masque glacial,

    La Lune pâle et ronde, attirante et blafarde,

    Comme un suave écu de cent sous idéal.

     

    Louis Denise,

    chat 3

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