Le pêcher

Au jardin

Le pêcher

Se dépêche

De fleurir.

Blanc et rose

Il défie

L’abricot

Son sosie.

J’ai la pêche

Lui dit-il

Chair juteuse

Et peau douce,

Toi tu n’es

Pas plus gros

Qu’un noyau.

Tu es sot

De vouloir

Devenir

Une pêche

Abricotée

C’est un manque

Insensé

De personnalité.

Joël Sadeler

Platane

Platane placide

Aux mains vertes

Grandes ouvertes

Pour l’ombre

Des bancs

Des gens

Sur la place.

Platane furieux

Colère du vent aidant

Arbre à claques

Fessées de feuilles

Sur les bancs

De la place

Du village

Toujours se méfier

De l’arbre qui dort.

Joël Sadeler extrait de « Trente-six chants d’arbres »

Un arbre

Respire

Un arbre,

Mille oiseaux

Chanteront dans ta poitrine

Milles feuilles

Palpiteront sous ta chemise

Mille branches

Te parleront d’un printemps à naître

Un nid d’étoiles

Se fichera

Où ton cœur bat

Et l’écorce des jours

Te paraîtra plus légère.

Joël Sadeler extrait de « Trente-six chants d’arbres »

Le châtaignier

J’aime le châtaignier l’hiver

Lorsqu’il hurle sa colère

De sa grande bouche noire

Et qu’il brandit ses branches

Comme des épées

Pour percer les nuages de neige.

Seul il accepte les corbeaux

Et comprend leur langage

Il va sur les terres humides

Ruminer des légendes

Lorsqu’il se met à siffler

Avec le vent glacial

Je lui parle

Et lui rappelle ses fruits grillés au feu

Michel  Cosem et Philippe Davaine

L’olivier

Depuis si longtemps

Il mélange la lumière au vent

Et les feuilles d’argent

Aux libres farandoles.

Ses racines et ses bras

Serrent contre lui

Femmes et oiseaux

Pour vivre sous le ciel bleu

Il a dans ses bagages

De grandes mottes de terre rouge.

Michel  Cosem et Philippe Davaine

Le charme

Il m’a envoyé

Une lettre d’amour

Naïve et légère.

C’était en plein été

Une petite graine rousse.

Elle m’est venue alors que tout bouillait

Dans le chaudron du soleil

Et je n’ai quoi su répondre

Tant elle était ingénue.

Depuis je vais le voir

En bordure de mon pré

Et j’ai remarqué que les chevreuils

Aiment à rester près de lui plus longtemps

Michel  Cosem et Philippe Davaine

Images http://www.vertdeterre.com

Mon tilleul

Mon tilleul qui chante l’été

Avec les abeilles et les hannetons

Avec ton large sourire sur le ciel bleu

Et ta folie de grand vent

Lorsque tu sèmes

Dans le pré

Tes graines voyageuses et impertinentes

Tu es comme un frère

Tu es toujours là où je t’attends

Avec tendresse et confiance

Avec connivence.

Michel  Cosem et Philippe Davaine

Le chêne

Je viens enfin à toi

Beau chêne

Conteur de songes

Porteur comme un vieux soldat

De légendes et de tragédies

D’histoires lourdes comme du plomb

Je viens à toi à la tombée du soir

Entre chevreuils et loups

Ecouter ce que tu veux dire

Le cœur pris

La peau en attente

Et je n’entends hélas

Que le dernier coucou

Et la plainte d’une colombe

Michel  Cosem et Philippe Davaine

Le cerisier

Elle allait au bal

Avec des perles sur les joues,

Des cerises aux oreilles

En robe de pétales roses

En manteau de feuilles rousses.

Elle qui allait au bal

Et dansait déjà dans sa tête

Claquant ses sabots de bois sur les pierres

Elle au bal de l’été

En habit

De printemps et d’automne.

Michel  Cosem et Philippe Davaine

L’Eucalyptus

Entendez dans le soir

L’arbre aux  fées

Qui dialogue et chante

Avec l’océan son cousin.

Il orchestre les tempêtes

Les tourbillons

Et le retour des pêcheurs

Recueille les oiseaux  migrateurs

Il est rocher, fanal, patrie

A lui tout seul

En haut des falaises

Il est un ami.

Michel  Cosem et Philippe Davaine