• Fleur solitaire

     

    Fleur solitaire

     

    Par un soir ténébreux de l'arrière-saison.
    Dans un coup de rafale une graine emportée,
    Tombant contre les murs d'une haute prison,
    Entre de vieux pavés mal joints s'est arrêtée.

    Dans ce lit de hasard elle dort tout l'hiver,
    Sous des blocs de granit froidement inhumée ;
    Mais quand au tiède avril le ciel bleu s'est ouvert,
    Elle tressaille et germe où le vent l'a semée.

    Alors, comme sortant d'un funèbre sommeil,
    Elle émerge à grand'peine et s'exhausse de terre,
    Et d'un suprême effort aspirant au soleil
    Elle frémit d'espoir, la pauvre solitaire.

    Puis, grâce à de longs jets flexibles et rampants,
    S'attachant par saut brusque ou par lente caresse,
    Comme la vigne vierge et les rosiers grimpants,
    Elle escalade enfin la haute forteresse.

    Quand elle arrive au bout de son rude chemin,
    Montant jusqu'au rebord d'une étroite fenêtre,
    Elle étale sa fleur près d'un visage humain
    Qu'elle a vu triste et pâle à la grille apparaître.

    À plein cœur exhalant son parfum printanier,
    La fleur s'épanouit... et meurt dans la soirée ;
    Mais elle s'est ouverte aux yeux du prisonnier,
    Qui seul a pu la voir, qui seul l'a respirée.

     

    André Lemoyne

    http://www.poesie-francaise.fr


  • Commentaires

    1
    Dimanche 8 Mai 2016 à 05:10

    Cette jolie fleur solitaire montre une chose, c'est que la nature reprend toujours ses droits. Et malgré l'homme qui ne cesse de se battre contre elle à coup de désherbant, elle finit toujours par vaincre avec obstination.  Bon dimanche Renal

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