• Bobby le rayon de soleil

     

    Un rayon de soleil se croit indispensable à l’éclat du soleil. Pour lui, c’est sûr, il est le plus puissant, le plus éclatant, le plus merveilleux de tous les rayons du soleil…
    Mais ses vantardises finissent par lasser ses collègues… Bobby, vexé de leurs railleries, va alors partir… Tant pis pour eux, tant pis pour le soleil ! Il va voir ailleurs… et va apprendre beaucoup !


    Il était une fois un rayon de soleil qui s’appelait Bobby.
    Depuis qu’il était né, il était persuadé que de tous les rayons, c’était lui qui brillait le plus.
    Certes, il rayonnait avec force : tout doré, d’une lumière éclatante, il luisait de mille feux.
    -« C’est vrai que je suis le plus beau des rayons du soleil. Mon éclat est superbe. Aucun autre ne m’égale. Je suis le plus fort ! »
    Mais d’autres rayons, lassés d’écouter ses vantardises, voulurent lui rabattre un peu son caquet.
    -« Pfffft, tu dis n’importe quoi, ce n’est pas toi le plus beau des rayons du soleil. Il y en a plein d’autres qui rayonnent mieux que toi… » dit l’un.
    -« Oui, je dirais même que tu parais un peu palot à côté. » ajouta un autre.
    -« Mais tu te modères ou quoi ! Brille plus, fais un effort quand même ! » s’exclama un troisième.
    Bobby les écouta, mettant leurs railleries sur le compte de la jalousie.
    -« Bof, vous dites ça parce que vous êtes jaloux de moi. C’est tout ! Moi, je connais la qualité de mon éclat. Ça vaut largement celui de tous les rayons réunis ! »
    -« Ah ben modeste en plus de ça ! » répondit l’un.
    -« Non mais pour qui tu te prends ? Tu t’es vu, oui ? Mon pauvre vieux, tu n’as rien d’exceptionnel ! » dit un autre.
    -« Oui, je suis sûr que de la terre, personne ne voit la différence. Si tu crois que l’on te remarque, tu te trompes ! » renchérit un troisième.
    Alors là, c’en était trop ! Bobby était outré. Quelle méchanceté ! Comment pouvait-on lui dire une chose pareille à lui, le trésor du soleil.
    Puisque c’était comme ça, ils allaient bien voir tous, si le soleil brillerait autant sans lui ! Il allait partir, voilà ce qu’il allait faire !
    Et tant pis pour eux, tant pis pour le soleil, tant pis pour le monde entier ! Ils l’avaient mis en colère, et ils en supporteraient les conséquences.
    Bobby fit ses valises, et quitta donc le soleil. Il partit à la recherche d’une étoile, où il pourrait faire valoir son éclat exceptionnel.
    Il en trouva une dans le ciel et s’y installa. Il entreprit alors de briller en se disant :
    -« Grâce à moi, cette étoile toute fade va retrouver de la brillance ! »
    Plusieurs semaines plus tard, il daigna regarder à nouveau vers le soleil. Alors, que se passait-il là-bas ? Est-ce qu’une partie s’était éteinte ? Il devait briller moins, forcément.
    Il chercha à repérer une zone laissée dans l’ombre, suite à son départ… Mais il eut beau scruter précisément tout le rond du soleil, il ne vit rien…
    -« Tiens, c’est bizarre… » se dit-il, « je dois regarder du mauvais côté, sans doute le trou noir est-il caché derrière… »
    Et il retourna à ses préoccupations de brillance, sur son étoile. A ses voisins, il disait :
    -« C’est petit ce que vous faites. Que diable, mettez le paquet, défoncez-vous ! Je suis sûr que nous pouvons arriver à dépasser l’éclat du soleil ! »
    Mais les autres n’en avaient pas envie, et commençaient à se lasser d’écouter la démesure de Bobby. Un jour, ils lui répondirent en chœur :-« Bon, Bobby, tu nous répètes que tu es le champion de la brillance, que tu es le meilleur… Peut-être, est-ce vrai… Mais ce qui est sûr, c’est que ta place n’est pas ici. Nous, nous nous trouvons très bien à briller ainsi. Alors rejoins ton soleil et éclate-toi là-bas, d’accord ? »
    -« Heu, bon, puisque vous ne voulez pas progresser… »
    -« C’est cela, tu as compris, alors va-t-en maintenant ! »
    Bobby reprit ses valises et chercha ailleurs. Il habita ainsi plusieurs étoiles, et, à chaque fois, le même scénario se reproduisait. Au bout d’un moment, il se faisait renvoyer par les autres rayons qu’il fatiguait avec ses critiques incessantes et ses soucis constants de performances.
    Il fit ainsi le tour du soleil, et, Ô surprise, ne découvrit aucun trou d’ombre.
    Cela n’était pas possible. Comment faisait-il pour briller ainsi, sans lui ?
    Puis, il dut se rendre à l’évidence. Son départ n’avait changé en rien la brillance du soleil. Il était toujours étincelant, éclatant de lumière.
    Finalement, ses anciens acolytes ne se débrouillaient pas si mal. Et lui, il n’était pas aussi indispensable qu’il le pensait.
    Un beau rayon, certes, il était. Un de ceux qui mettait du cœur à l’ouvrage. Mais, pas le meilleur, ni le plus puissant. Un comme un autre, voilà ce qu’il était.
    Il retourna penaud, vers le soleil, un peu inquiet. Et si on ne voulait plus de lui maintenant. Si son ancienne arrogance lui fermait les portes du soleil.
    Il toqua le soleil et lui demanda, les yeux baissés, s’il voulait bien qu’il reprenne du service. Il s’excusa aussi de son comportement d’antan.
    -« J’ai changé, je ne suis plus le même, j’ai compris plein de choses… Est-ce que vous voulez bien encore de moi ? » demanda-t-il.
    Le soleil sourit, et l’accueillit bienveillamment.
    -« Tu es le bienvenu, Bobby ! Je suis heureux de ton retour. Tu peux rejoindre tes frères. »
    Et Bobby, le cœur en joie, reprit sa place parmi les siens. Il les félicita sincèrement de leur travail, et leur dit combien il avait pu les admirer de loin.
    Il se mit au diapason, et contribua à baigner le ciel de cette si douce lumière que donne le soleil.


    Hélas bien des personnes, ne savent pas reconnaître que parfois il faut mettre son orgueil de côté. Pour redevenir comme ce rayon de soleil à la fin il faut reconnaître ses torts

    Ce conte a été écrit par Valérie BONENFANT, il se trouve sur son site, il y en a pleins d’autres, un vrai bonheur pour les petits et les grands. Je vous conseille vivement de y passer faire un petit tour

    http://environnement.ecoles.free.fr/contes

     


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  • Le monde sans  les enfants

    Un beau matin, ou plutôt, un sale matin, oui, oui, un vraiment sale matin, quand les hommes ouvrirent l'œil, ils se rendirent compte qu'il se passait quelque chose de bizarre. Pas de bruits. Pas de rires. Pas de gazouillis. Rien du tout : les enfants avaient disparu ! Quand je dis les enfants, je veux dire tous les enfants, partout dans le monde, dans tous les pays, dans toutes les villes, dans toutes les campagnes. On eut beau chercher, bien fouiller, mobiliser les pompiers, la police, les militaires, on ne trouva pas un seul enfant. La seule chose sur laquelle on mit la main, ce fut un morceau de papier un peu froissé où une très petite écriture malhabile, pleine de fautes d'orthographe, avait noté le message suivant : « On se fée tout le tems disputer, on ne nous écoutent jamais, on ne peux pas rigolé quand on veux, on doit se coucher trop taux, on ne peut pas mangé de chocolat au lit, il faut toujours qu’on se brosse les dents : on en a assez des grands : on s'en vat. On vous lesse!» Et c'était signé : «Les zenfants. »

    Panique générale ! Parents inconsolables ! Familles en larmes !

    Les princes et les chefs de gouvernement promirent qu'ils allaient retrouver les enfants. Mais ceux-ci étaient bien cachés. Ils s'étaient tous rassemblés dans l'oasis de Kerambala, tout à fait au sud de la Madéranie, une contrée inaccessible aux grands. Là, personne ne les embêtait. Il y avait à manger et à boire à profusion. On pouvait très bien ne pas se laver, se coucher à minuit. On n'allait pas à l'école. On se laissait pousser les ongles. On jouait toute la journée. On s'empiffrait de bonbons. On faisait chaque matin des jeux olympiques de saute-mouton. Et surtout, surtout, on ne se faisait jamais disputer ! Jamais !

    Sur les chaînes de télévision, le pape implora les enfants. Le dalaï-lama leur récita un poème. Les présidents de toutes les républiques leur promirent des distributions quotidiennes de glace à la fraise et des heures obligatoires de dessins animés dans les écoles. Tous les parents supplièrent leurs petits chéris. Les radios diffusaient sans cesse les sanglots des papas et des mamans, ce qui faisait bien rire les enfants. Mais surtout, surtout, le monde était devenu d'une tristesse épouvantable. Les villes ressemblaient à de grands territoires morts. Les parcs et les jardins publics étaient frappés d'un étrange sommeil. Les maisons restaient silencieuses. Les adultes erraient comme des âmes en peine, ne se regardaient pas, ne se parlaient même plus.

    Un soir, les enfants décidèrent que la leçon avait assez duré. Ils regagnèrent leur chambre tous en même temps et le lendemain, sur toute la surface de la planète, les hommes se réveillèrent de nouveau avec les enfants.

    Fête générale ! Feux d'artifice ! Flopées de bisous !

    Les enfants furent accueillis comme des héros et traités comme des rois. On leur promit tout ce qu'ils voudraient. La Terre enfin tournait de nouveau rond. Mais le temps passe pour tout le monde, et aussi pour les enfants. Et les enfants un jour ou l'autre deviennent grands, et deviennent parents en ayant eux aussi des enfants, des enfants qu'ils aiment tant mais que tout de même ils disputent, ils punissent et qui les font râler. Car le problème, voyez-vous, c'est que quand on est grand, on oublie, on oublie presque tout, et on oublie surtout qu'on a été enfant.

    Alors un beau matin, ou plutôt un sale matin, oui, oui, un vraiment sale matin, on se réveille, «Mon Dieu ! Que se passe-t-il ? » Et on se rend compte que les enfants ont disparu, quand je dis les enfants je veux dire tous les enfants, partout dans le monde, dans tous les pays, dans toutes les campagnes, et on a beau chercher, bien rouiller, mobiliser les pompiers, la police...

    (Extrait du livre de Philippe Claudel "Le monde sans les enfants et autres histoires")

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  •  

    L’aiglon

     

    Une légende très connue en Afrique rapporte qu'un jour un chasseur trouva dans la forêt un aiglon tombé du nid. Il le prit avec lui, l'installa dans son poulailler. Le roi des oiseaux grandissait entouré de poussins qui lui apprirent très tôt à vivre comme eux : il picorait son maïs et, comme eux, il sautillait dans la basse-cour.

    Quelques mois plus tard, le paysan-chasseur se posa des questions sur les grandes ailes de cet oiseau majestueux qui pouvait parfaitement voler et qui ne l'avait jamais fait parce qu'il avait toujours été enfermé. Ce brave homme prit conscience de ce qu'il avait fait et décida de relâcher l'animal. Il le fit sortir du poulailler, le prit délicatement dans ses bras pour le déposer sur une colline. Là, il le hissa et lui dit : « Tu es un aigle. Tu es un oiseau du ciel, non pas de la terre. Ouvre tes ailes et vole ! » Mais l'oiseau ne bougea pas. Du haut de cette colline, Il aperçut les poulets et, en sautillant, alla les rejoindre. Le paysan ne faisait que lui dire : « Il ne faut pas te rabaisser au niveau de ces poules qui ne font que se chamailler pour picorer quelques grains par terre. Ouvre tes ailes et vole ! ». Mais le jeune aigle était de plus en plus troublé, cet objectif exigeant le dépassait. Il tremblait de tout son corps et montrait qu'il ne voulait que regagner cet endroit protégé.

     

    Le paysan ne se découragea pas. Le lendemain, très tôt, il l'emmena sur une très haute montagne. Au sommet, il le prit à nouveau, et le levant dans ses bras, il le força à regarder le soleil luisant du matin, tout en l'encourageant : « Tu es un aigle. Tu es né pour évoluer librement dans les airs, pour atteindre le soleil. Tu peux parcourir des distances énormes et jouer avec le vent. N'aie pas peur ! Vas-y, essaie ! Ouvre tes ailes et vole ! ». Alors, l'aigle, fasciné par la lumière, se dressa en seigneur, déploya lentement ses ailes, et avec un cri de triomphe, prit son envol, de plus en plus haut, pour disparaître à l'horizon.

     

    « Qui est né avec des ailes doit s'en servir pour voler », se dit le paysan qui repartit chez lui en chantant.

     

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  • Extrait du livre de Benoît XVI

    « Lumière du monde »

    (Le pape, l’Église et les signes des temps)

    Entretien avec Peter Seewald

     

    Résumé : « Le Pape veut aujourd'hui que son Église se soumette à une sorte de purification fondamentale, Il s'agit selon lui de montrer Dieu aux hommes, de leur dire la vérité. La vérité sur les mystères de la Création, La -vérité sur l'existence humaine. Et la vérité sur notre espérance, au-delà même de notre seule vie sur terre, »

     

    Jamais un pape n'avait pris une telle décision : ouvrir son cœur à tous, ne laisser aucune question de côté. Comment Benoît XVI

     

    juge-t-il les cinq premières années de son pontificat? Comment se voit-il en pape? Que nous dit-i! à propos du scandale des abus sexuels dans l'Église, du cas Williamson, de la réforme de l'Église ? Quel dialogue er quelles relations avec le judaïsme, avec l'islam ? Que dit le chef de plus de un milliard de catholiques sur les évolutions de la société occidentale, sur les défis éthiques, écologiques de notre monde, sur l'athéisme contemporain ?

     

    Peter Seewald est journaliste et écrivain allemand. Le pape Benoît XVI l'a exceptionnellement reçu en juillet 2010 dans sa résidence de Caste! Gandolfo, plus de treize ans après leur premier livre (Le sel de la terre, 1997} quand le Pape n'était encore que le cardinal Joseph Ratzinger.

     

     

     

    « Avec Benoît XVI, personne ne tremble. Il facilite la tâche du visiteur. Ce n'est pas un prince de l'Église, mais l'un de ses serviteurs, un grand homme qui donne et qui puise toute sa force dans son don. Parfois il vous regarde d'un air un peu sceptique. Comme cela, au-dessus des lunettes. Grave, attentif. Et lorsqu'on l'écoute, quand on est assis à côté de lui, on ne sent pas seulement la précision de sa pensée et l'espoir qui naît de la foi : c'est un éclat de la lumière du monde qui devient singulièrement visible, un reflet du visage de Jésus Christ, qui veut rencontrer chaque être humain et n'exclut personne. (Peter Seewald) »

     

    « Vous êtes maintenant le pape le plus puissant de tous les temps. Jamais auparavant l’Église catholique n’a eu autant de fidèles, jamais elle n’a connu une telle extension, littéralement jusqu’aux extrémités du monde. »(PS)

     

    « Le pouvoir du pape n’est pas fondé sur les chiffre.

     

    La communion avec le pape est d'un autre ordre, tout comme, bien entendu, et naturellement, l'appartenance à l'Église. Parmi ce 1,2 milliard, beaucoup n'en font pas intimement partie. Saint Augustin l'a déjà dit en son temps : il en est beaucoup dehors qui semblent être dedans, et il y en a beaucoup dedans qui semblent être dehors. En matière de foi, d'appartenance à l'Église catholique, intérieur et extérieur sont mystérieusement entrelacés. En cela Staline, déjà, avait raison de dire que le pape n'a pas de divisions et qu'il ne commande rien. Il n'est pas non plus à la tête d'une grande entreprise où tous les fidèles de l'Église seraient pour ainsi dire ses employés ou ses sujets.

     

    D'un côté, le pape est un être tout à fait impuissant. D'un autre côté, il a une grande responsabilité. Il est, dans une certaine mesure, celui qui conduit, le représentant de la foi, il a en même temps la responsabilité de faire que l'on croie en la foi qui unit les hommes, qu'elle demeure vivante et qu'elle reste intacte dans son identité. Mais seul le Seigneur Lui-même a le pouvoir de maintenir les hommes dans la foi. »

     

    « Le mal appartiendra toujours au mystère de l’Église. Quand on voit tout ce que des hommes, tout ce que des ecclésiastiques ont fait dans l’Église, c’est précisément une preuve que le Christ soutient l’Église et l’a fondée. Si elle ne dépendait que des hommes, elle aurait péri depuis longtemps. »

     

    « L’homme doit chercher la vérité ; il est capable de vérité. Que la vérité ait besoin de critères qui permettent de la vérifier et de s’assurer qu’elle n’a pas été falsifiée, cela va de soi. Elle doit toujours aussi aller de pair avec la tolérance. Mais la vérité nous fait alors apparaître ces valeurs constantes qui ont donné sa grandeur à l’humanité. Il faut apprendre de nouveau et pratiquer l’humilité qui permet de reconnaître la vérité comme porteuse de repères. Que la vérité ne parviendra pas à régner par la force, mais par son propre pouvoir, c’est le contenu central de l’Évangile selon Saint Jean. Jésus se présent devant Pilate comme La Vérité et comme témoin de la vérité. Il ne défend pas la vérité avec l’aide de légions, mais la rend visible par sa Passion, et c’est aussi de cette façon qu’il la met en vigueur. »

     

    « Nous devons nous efforcer de faire en sore que les deux, Église et pensée moderne, autant que cela puisse se concilier, s’adaptent l’une à l’autre. L’existence chrétienne ne doit pas devenir une sphère archaïque que je maintiens d’une manière ou d’une autre et où je vis en quelque sorte à côté de la modernité. C’est bien plutôt quelque chose de vivant, de moderne, qui travaille et forme l’ensemble de ma modernité qui littéralement, l’embrasse.

     

    Il est important que nous essayons de vivre et de penser le christianisme de telle manière que la bonne, la vraie modernité l’accepte en soi et en même temps se sépare et se distingue de ce qui devient une contre-religion. »

     

    « On se demande souvent comment il est possible que les chrétiens, qui sont personnellement des êtres croyants, n'aient pas la force de mettre leur foi plus fortement en action sur le plan politique. Nous devons avant tout veiller à ce que les hommes ne perdent pas Dieu du regard. Qu'ils reconnaissent le trésor qu'ils possèdent. Et qu'ensuite, d'eux-mêmes, avec la force de leur propre foi, ils puissent se confronter à la sécularisation et accomplir la séparation des esprits: Cet immense processus est la véritable grande tâche de notre époque. Nous pouvons seulement espérer que la force intérieure de la foi présente dans les hommes acquière aussi une puissance dans la vie publique, en marquant aussi publiquement la pensée, et pour que la société ne tombe pas simplement dans un gouffre sans fond. »

     

    « Vous êtes resté vingt-quatre ans aux côtés de Jean-Paul II et vous connaissiez la curie comme personne. Mais combien de temps vous a-t-il fallu pour comprendre tout à fait le gigantisme écrasant de cette charge ? »

     

    « On comprend très vite que c'est une charge immense. Quand on sait que comme aumônier, comme curé, comme professeur, on porte déjà une grande responsabilité, il est facile d'imaginer par extrapolation quel fardeau gigantesque pèse sur celui qui porte la responsabilité de toute l'Église. Mais alors on doit être d'autant plus conscient que l'on ne fait pas cela tout seul. On le fait d'un côté avec l'aide de Dieu, d'un autre côté avec un grand nombre de collaborateurs. Vatican II nous a enseigné avec raison que la collégialité est constitutive de la structure de l'Église. Que le pape n'est premier qu'avec les autres et qu'il n'est pas quelqu'un qui prendrait des décisions tout seul en monarque absolu et ferait tout lui-même. »

     

    « L’Église catholique est le premier et le plus grand global Player  de l'histoire du monde. Mais il est notoire qu'elle n'est pas une entreprise et que le pape n'est pas le chef d'un groupe industriel  Qu’est-ce qui la différencie de la direction d'un empire commercial multinational ? »

     

    « Eh bien, nous ne sommes pas un centre de production nous ne sommes pas une entreprise qui recherche le profit nous sommes l'Eglise. C'est-à-dire une communauté d'hommes et de femmes rassemblée dans la foi. Notre tâche n'est pas de fabriquer n'importe quel produit ou d'avoir du succès dans la vente de marchandises. Notre tâche est plutôt de vivre la foi de la proclamer et en même temps de maintenir cette communauté de volontaires qui traverse toutes les cultures, qui franchit les nations et les époques, et qui ne repose pas sur des intérêts extérieurs, mais sur une relation intérieure avec le Christ et donc avec Dieu lui-même. »

     

    « Nous vivons aujourd’hui dans un monde totalement différent où les lignes de front ont changé. Dans lequel on trouve d’un côté une sécularisation radicale, de l’autre côté la question de Dieu, dans toute sa diversité. L’identité de chaque religion doit bien entendu subsister. Nous ne pouvons par nous dissoudre les unes dans les autres. Mais d’un côté il faut essayer de se comprendre mutuellement.

     

    Nous devons en tout cas essayer de vivre ce que notre foi a de grand et d’en donner une image vivante, mais aussi de comprendre l’héritage des autres. L’important, c’est de trouver ce que nous avons de commun et de servir ensemble dans ce monde, là où c’est possible. »

     

    « Le pape n’est peut pas l’homme le plus puissant du monde, mais ses voyages planétaires lui permettent de toucher des millions de personnes, plus que n’importe quelle pop star. Autrefois, on ne vous considérait pas forcément comme un grand tribun. Cela donne le trac ? »

     

    « Les voyages me mettent tout de même toujours beaucoup à contribution. Le trac, à proprement parler, je ne l’ai pas, car tout est bien préparé. Je sais que ne parle pas en mon nom propre, que je suis simplement là au nom du Seigneur – et je ne dois pas me demander si je fais bien les choses, si j’ai bonne mine, si je suis apprécié, et toute cette sorte de choses. J’accomplis la mission qui m’a été confié, en ayant conscience de le faire au nom d’un autre, et que cet autre répond aussi de moi. Dans ce sens, ces voyages se déroulent sans craintes intérieure. »

     

    « Votre prédécesseur passait pour un grand bateleur dont la seule présence physique, la voix et la gestuelle produisait un effet considérable et avait un immense écho dans les médias. Vous n’avez pas forcément la même stature, ni la même voix. Cela vous a-t-ii posé un problème. »

     

    Je me suis simplement dit : je suis comme je suis, je ne cherche pas à être un autre. Ce que je peux donner, je le donne, et ce que je ne peux pas donner, j’essaie aussi de ne pas le donner. Je ne cherche pas à faire de moi-même ce que je ne suis pas. J’ai été élu, c’est tout, les cardinaux en portent aussi la responsabilité, et je fais ce que je peux.

     

    « Quelles que soient les transformations, l'homme reste cependant toujours le même. Il n'y aurait pas tant de croyants si les gens n'avaient pas toujours cette idée au fond de leur cœur : Oui, ce qui est dit dans la religion, c'est ce dont nous avons besoin. La science à elle seule, de la manière dont elle s'isole et prend son autonomie, ne couvre pas la totalité de notre vie. C'est un domaine qui nous apporte de grandes choses, mais pour y parvenir telle a besoin que l'homme reste un homme. Nous avons bien vu que le progrès a certes fait progresser nos capacités, mais ni notre grandeur ni notre humanité. Nous devons retrouver un équilibre intérieur, et nous avons aussi besoin de grandir intellectuellement : cela, nous le voyons de mieux en mieux, dans les grandes difficultés de notre temps. Même lors des nombreuses rencontres avec les grands chefs d'État, je ressens une puissante conscience du fait que le monde ne peut pas fonctionner sans la force de l'autorité religieuse. »

     

    « Dieu ne s’impose pas. Il ne le fait pas de la manière dont je peux constater : ici, sur la table, il y a un verre ; il est là ! Son existence est une rencontre qui descend jusqu’au plus intime et au plus profond de l’homme mais ne peut jamais être réduite à la tangibilité d’une chose purement matérielle. C’est la raison pour laquelle, compte tenu des dimensions de l’événement, il est clair que la foi est toujours quelque chose qui se produit dans la liberté. Elle recèle la certitude qu’il s’agit de quelque chose de vrai, d’une réalité, mais à l’inverse, elle n’exclut jamais totalement la possibilité de la négation. »

     

    « Il y a quatorze ans je vous demandais si cela valait seulement encore la peine d’embarquer à bord de l’Église, ce bateau qui paraît déjà un peu affecté par les faiblesses de l’âge. Il faut demander aujourd’hui si ce navire ne ressemble pas de plus en plus à une arche de Noé. Qu’en dit le pape ? Pouvez-vous encore nous sauver par nos propres forces, sur cette planète ?

     

    « Par ses propres forces, l’homme ne peut de toute façon pas maîtriser l’histoire. Que l’homme soit en péril et qu’il mette le monde en danger, on en a aussi aujourd’hui des preuves scientifiques. Il ne peut être sauvé que si les forces morales grandissent dans son cœur ; des forces qui ne peuvent venir que de la rencontre avec Dieu ; des forces qui résistent. Dans cette mesure, nous avons besoin de lui. L’autre qui nous aide à être ce que nous ne pouvons être nous-mêmes ; et nous avons besoin du Christ, qui nous rassemble au sein d’une communauté que nous appelons l’Église. »

     

     

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  • Quelqu’un frappe à la porte

     

    Quelqu’un frappe à la porte,

    Serait-ce Lui, enfin,

    Celui qui nous apporte

    L’espérance et le pain ! ...

     

    C’est bien Lui, il me semble

    Qui nous tenait la main,

    Quand nous allions ensemble

    Affronter l’incertain ...

    Il parlait d’une “Eau Vive”,

    Nous étions assoiffés

    Et puis d’une autre rive

    Qu’il nous faut rechercher …

     

     Il a gardé, par chance,

    Son accent d’étranger,

    Le goût des différences,

    Le sens de l’unité,

    Il a tout dit, en somme,

    Avec le verbe Aimer

    Au nom des droits de l’homme

    Et de la dignité...

     

    Un soir, dans notre auberge,

    Nous l’avons invité,

    Un matin sur la berge,

    Nous l’avons rencontré,

    Belle fut l’aventure,

    Nous l’avions entendu,

    Oubliées les blessures

    Puisque nous l’avions vu..

     

    Jean Claude Gianadda

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