• Je t'aime

      

    Je t'aime pour toutes les femmes que je n’ai pas connues

    Je t'aime pour tous les temps où je n'ai pas vécu

    Pour l'odeur du grand large et l'odeur du pain chaud

    Pour la neige qui fond pour les premières fleurs

    Pour les animaux purs que l'homme n'effraie pas

    Je t'aime pour aimer.

    Je t'aime pour toutes les femmes que je n'aime pas

    Qui me reflète sinon toi-même je me vois si peu

    Sans toi je ne vois rien qu'une étendue déserte

    Entre autrefois et aujourd'hui

    Il y a eu toutes ces morts que j'ai franchies sur de là paille

    Je n'ai pas pu percer le mur de mon miroir

    Il m’a fallu apprendre mot par mot la vie '.

    Comme on oublie

    Je t'aime pour ta sagesse qui n'est pas la mienne

    Pour la santé

    Je t'aime contre tout ce qui n'est qu'illusion

    Pour ce cœur immortel que je ne détiens pas

    Tu crois être le doute et tu n'es que raison

    Tues le grand soleil qui me monte à la tête

    Quand je suis sur de moi.

     

     

    (Louis Aragon) 

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  • Se voir le plus possible.

      

    Se voir le plus possible et s'aimer seulement,

    Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge,

    Sans qu'un désir nous trompe ou qu'un remords nous ronge,

    Vivre à deux et donner son cœur à tout moment ;

      

    Respecter sa pensée aussi loin qu'on y plonge,

    Faire de son amour un jour au lieu d'un songe,

    Et dans cette clarté respirer librement,

    Ainsi respirait Laure et chantait son amant.

     

     

    Vous dont chaque pas touche à la grâce suprême,

    C’est vous, la tête en fleurs, qu'on croirait sans souci,

    C’est vous qui me disiez qu'il faut aimer ainsi.

    Et c'est moi, vieil enfant du doute et du blasphème,

     

    Qui vous écoute et pense, et vous réponds ceci :

    Oui, on vit autrement, mais c'est ainsi qu'on aime.

     

    (Alfred de Musset)

    Se voir le plus possible.


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  • Les Roses de Saadi

     

     

    J'ai voulu, ce matin, te rapporter des roses;

    Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes

    Que les nœuds trop serrés n'ont pu les contenir.

     

     

    Les nœuds ont éclaté. Les roses envolées

    Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées.

    Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir.

     

     

    La vague en a paru rouge et comme enflammée

    Ce soir ma robe encore en est tout embaumée...

    Respire-en sur moi l'odorant souvenir.

     

    (Marceline Desbordes-Valmore)

    Les Roses de Saadi, Sonnet


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  •  Se voir le plus possible.

     

    Se voir le plus possible et s'aimer seulement,

    Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge,

    Sans qu'un désir nous trompe ou qu'un remords nous ronge,

    Vivre à deux et donner son cœur à tout moment ;

     

    Respecter sa pensée aussi loin qu'on y plonge,

    Faire de son amour un jour au lieu d'un songe,

    Et dans cette clarté respirer librement,

     

    L’'amour, Stances galantes

     

    Sonnet

     

    Mon âme a son secret, ma vie a son mystère.

    Un amour éternel en un moment conçu :

    Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire,

    Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su.

     

     

    Hélas ! J’aurai passé près d'elle inaperçu.

    Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire;

    Et j'aurai jusqu'au bout fait mon temps sur la terre

    N’osant rien demander et n'ayant rien reçu.

     

      

    Pour elle, quoique Dieu l'ait faite douce et tendre,

    Elle suit son chemin, distraite et sans entendre

    Ce murmure d'amour élevé sur ses pas.

    A l’austère devoir pieusement fidèle.

    Elle dira, lisant ces vers tout remplis d'elle :

    Qu’elle est donc cette femme? » Et ne comprendra pas.

     

    (Félix Arvers)

     

    L’'amour, Stances galantes

     

    Stances galantes

     

     

    Souffrez qu'Amour cette nuit vous réveille;

    Par mes soupirs laissez-vous enflammer;

    Vous dormez trop, adorable merveille,

    Car c'est dormir que de ne point aimer.

     

    Ne craignez rien ; dans l'amoureux empire

    Le mal n'est pas si grand que l'on le fait

    Et, lorsqu'on aime et que le cœur soupire,

    Son propre mal souvent le satisfait.

     
     

    Le mal d'aimer, c'est de vouloir le taire :

    Pour l'éviter, parlez en ma faveur.

    Amour le veut, n'en faites point mystère.

    Mais vous tremblez, et ce dieu vous fait peur !

     

    Peut-on souffrir une plus douce peine ?

    Peut-on subir une plus douce loi ?

    Qu'étant des cœurs la douce souveraine,

    Dessus le vôtre Amour agisse en roi ;

     

    Rendez-vous donc, ô divine Amarante !

    Soumettez-vous aux volontés d'Amour ;

    Aimez pendant que vous êtes charmante,

    Car le temps passe et n'a point de retour.

     

    (Molière 1632-1683)

     

    L’'amour, Stances galantes

     

    L’'amour ressemble un champ, le laboureur l'amant;

    L’un et l'autre présume, à la fin de l'année,

    Selon qu'elle sera mauvaise ou fortunée,

    Moissonner le chardon, la paille ou le froment.

     

     

    La paille est la douceur d'un vain contentement,

    Mais le vent la dérobe aussitôt qu'elle est née ;

    Le chardon, la rigueur d'une Dame obstinée ;

    Et la grâce est le grain qu'on recueille en l'aimant.

     

     

    L’amant ne peut gagner, pour service qu'il fasse

    Un point d'honneur plus haut qu'être en la bonne grâce

    D'une Dame accomplie, objet de sa langueur.

     

     

    La grâce vient du cœur, et toute autre espérance

    S’éloigne du devoir d'honnête récompense.

    Ne désire-t-on plus en amour que le cœur ?    

     

    (Margueritede France)

     

    L’'amour, Stances galantes


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  • Perce-moi

    Perce-moi l'estomac d'une amoureuse flèche,

    Brûle tous mes désirs d'un feu étincelant,

    Élève mon esprit d'un désir excellent.

    Foudroie de ton bras l'obstacle qui l'empêche.

    Si le divin brandon de ta flamme me sèche

    Fais sourdre de mes yeux un fleuve ruisselant :

    Qu'au plus profond du cœur je porte recelant,

    Des traits de ton amour la gracieuse brèche.

    Puisque tu n'es qu'amour, ô douce charité,

    Puisque pour trop aimer tu nous as mérités

    Tant de biens infinis et d'admirables grâces,

    Je te veux supplier par ce puissant effort

    De l'amour infini qui t'a causé la mort,

    Qu'en tes rets amoureux mon âme tu enlaces

     

    (Gabrielle de Coignard)

    Perce-moi


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